Les CV qui flottent au vent et pendent des cordes à linge comme autant de lessive en train de sécher transmettent des faits concrets : âge, taille, éducation, propriété, salaire. Bienvenue au marché extérieur du mariage au parc du Peuple de Shanghai, là où les parents affluent chaque week-end à la recherche d'un bon parti pour leur fille célibataire.
De tels marchés de mariage existent dans beaucoup de villes chinoises, et un examen plus attentif des CV indique que plusieurs de ces femmes célibataires se rangent dans des catégories semblables : haut niveau d'éducation, axée sur la carrière et vieillissante.
En Chine, les femmes célibataires de plus de 30 ans, et même dans la mi et fin vingtaine, peuvent se voir affublée de l'étiquette de sheng nu ou (femmes qui restent), et elles subissent souvent une forte pression pour se marier.
Dans un monde différent, la proportion hommes-femmes en Chine pourrait favoriser les femmes, mais à cause de la forte tradition sociale, c'est l'opposé qui est vrai. Ici, on a longtemps cru que les femmes doivent se marier en se souciant du revenu, de l'éducation et de l'âge. Et alors que les femmes chinoises grimpent dans l'échelle sociale – elles sont de plus en plus instruites et gagnent des salaires plus élevés − le groupe de prétendants viables se rétrécit rapidement.
Les femmes ayant le niveau d'éducation le plus haut finissent souvent seules, car de plus en plus de professionnelles disent qu'elles ne peuvent tout simplement pas trouver des hommes qui sont à la hauteur.
De plus, le mariage dès le jeune âge a longtemps été la norme en Chine. En 1950, l'âge moyen du premier mariage des citadines était de moins de 20 ans. Dans les années 1980, c'était 25 ans. Maintenant, c'est environ 27 ans.
Il est alors pas étonnant que les femmes soient critiquées si elles choisissent de rester célibataires, particulièrement au moment où la campagne se remplit d'hommes qui ne peuvent pas se marier parce que leur nombre dépasse celui des femmes en âge de se marier.
Ce n'est pas simplement les mères et les pères qui veulent que leur fille trouve un conjoint, mais également les établissements gouvernementaux et universitaires qui considèrent cet énorme groupe de femmes célibataires comme une source potentielle d'instabilité sociale.
Les médias ont accusé un grand nombre de femmes de se concentrer excessivement sur la recherche d'un homme ayant un appartement plus grand et une voiture de luxe, plutôt que sur des perspectives plus terre-à-terre, comme le véritable amour. Le phénomène a également alimenté une vague d'émissions de rencontres qui inondent la télévision chinoise.
« Les Sheng nu sont diabolisées », a déclaré Sandra Bao qui a fondé un groupe social intitulé « l'attitude des femmes qui restent » à Shanghai afin de soutenir les professionnelles célibataires. « Les parents font pression sur nous, les médias nous étiquettent, et il y a une industrie entière d'intermédiaires et d'autres qui nous disent que c'est un problème d'être célibataire. »
Elle a noté qu'un grand nombre de femmes modernes et célibataires en Chine apprécient leur indépendance et se sentent confortables d'attendre l'homme qui sera le bon, même si elles vieillissent. « Elles ne veulent pas faire de compromis en raison de l'âge ou des pressions sociales », a-t-elle confié.