Après l'effort, le réconfort...
Pendant ce temps-là, Hu Yue restait alitée, ne se levant que pour aller au petit coin. C'est la tradition post-partum OBLIGATOIRE en Chine, appelé yuezi (« être en couches »). Pendant 40 jours, la nouvelle mère doit rester allongée, ne pas être en contact avec l'eau (pas de douche, pas de lavage de cheveux, pas de lavage de dents…) et toute autre source de « froid » (boissons froides, ventilateurs ou fenêtre ouverte…), sans pour autant passer son temps devant un écran de télévision, de portable ou d'ordinateur, au risque de s'abîmer les yeux. Pour toute occupation, la femme boit des soupes protéinées, préparées par ses belles-mères présentes ou par une yuesao, une femme de ménage-nourrice. Il existe même des centres semi-médicalisés spécialisés, assez onéreux, où les femmes, en plus de soins et services, reçoivent des conseils pour s'occuper a posteriori de leur nouveau-né.
Cette tradition remonte à l'époque où l'accouchement, par voie naturelle, était une rude épreuve pour la mère et où l'eau était potentiellement porteuse de maladies. Puis la coutume s'est perpétuée. Toutes les Chinoises le font ; aucune étrangère ne le fait… Les sites français sur la grossesse préconisent au contraire une alimentation équilibrée et des exercices sportifs pour remuscler son corps, ainsi qu'une toilette intime minutieuse.
À ce choc des cultures, de nombreux Chinois suggèrent que les femmes occidentales sont plus fortes, parce qu'elles ont mangé plus de viande et de fromage dans leur vie... Selon moi, la différence résulte avant tout du contexte : les femmes chinoises sont prêtes à accueillir leur mère ou belle-mère 24h/24 chez elles pour s'occuper du bambin ; les femmes occidentales refusent en général que quelqu'un vienne perturber leur couple et doivent donc retrouver au plus vite toute l'énergie nécessaire pour s'occuper du nourrisson.
Ainsi, Nina, qui n'a pas respecté la « règle chinoise », s'est pris quelques réflexions : « Des passants dans la rue me disaient que le bébé était trop petit pour sortir. Un jour aussi, je suis allée voir un photographe avec Mylo. Il me fallait une photo d'identité pour faire une demande de visa. Mais comme il n'avait que deux mois, le photographe avait catégoriquement refusé », narre-t-elle. Néanmoins, elle s'est vite sentie comme une célébrité avec sa poussette. « Les Chinois ADORENT les bébés étrangers. Très vite, j'ai dû apprendre à leur dire de ne pas toucher Mylo, par sécurité », ajoute-t-elle.
Maintenant que Nina a repris le travail, c'est une ayi (femme de ménage) qui s'occupe du petit depuis ses quatre mois. « Avec mon mari, nous la considérons comme une membre à part entière de la famille. Grâce à elle, Mylo pourra apprendre le chinois, en plus de l'anglais », espère-t-elle.
Chez Hu Yue et son mari, ce sont les deux grands-mères, plus une femme de ménage, qui jouent les nounous. Et elles peuvent se targuer d'être les nounous de célébrités, car pour garder des souvenirs de la grossesse, le mari de Hu Yue avait pris une série de clichés et les avait publiés sur Weibo. De nos jours, Hu Yue compte 35 000 fans sur ce microblog ; son mari en possède pas moins de 50 000. Mais aujourd'hui, c'est à ces nouveau-nés qu'il nous faut souhaiter tout le succès possible dans leur vie future.