A quelques heures de l'ultime réunion de concertations entre le Premier ministre tunisien Hamadi Jebali et différents partis politiques sur la composition du nouveau gouvernement apolitique, les trois partis de la coalition ont bel et bien exprimé leurs positions définitives en la matière à l'issue de leurs conseils nationaux tenus exceptionnellement le week-end passé donnant lieu à deux clans.
Alors que le Forum démocratique pour le Travail et Libertés (parti du président de la Constituante) appuie l' initiative de M. Jebali de former un nouveau cabinet de compétences nationales, le parti islamiste majoritaire Ennahdha ainsi que le Congrès pour la République (pari du chef de l' Etat) persistent à refuser un tel cabinet qui, selon eux, "ne s' inspire pas de la légitimité populaire et électorale du 23 octobre 2011" (élections de l' Assemblée constituante).
Lors d' une réunion extraordinaire du conseil national de son parti, le président du Forum démocratique pour le Travail et Libertés (FDTL) Mustapha Ben Jaafar a estimé que l' atout de l' initiative du Premier ministre "est qu' elle tire le tapis sous les pieds de ceux qui tentent d' attiser les division et qui commencent à prendre de l' ampleur après l' assassinat du militant Chokri Belaïd" (l' un des principaux opposants anti-Ennahdha assassiné le 6 février 2013).
Le président du FDTL a averti que la révision de la décision du Premier ministre pourrait avoir des répercussions "risquées" d' autant plus que cette initiative, a-t-il précisé, "constitue un engagement national et international important et un pas audacieux pour briser la logique d' attachement au pouvoir".
Cependant, les deux autres partis de la coalition tripartite au pouvoir (Ennahdha et le Congrès pour la République) ont tenu à leurs positions rejetant la formation d' un gouvernement restreint de technocrates et exhortant le PM Jebali à modérer sa décision sur la voie d' un gouvernement de coalition nationale fondée sur la légitimité électorale et renforcé par des compétences apolitiques à la tête des ministères techniques dont le Commerce, l' Industrie, l' Investissement et le développement régional.
Pour ce qui est des ministères de souveraineté (Intérieur, Affaires étrangères et Justice) étant la source fondamentale du conflit au sein de la Troïka au pouvoir, le parti Ennahdha a affiché une relative "flexibilité" avec son intention de céder ces ministères à ses alliés dans le cadre d' un consensus et au titre de l' intérêt suprême de la Tunisie.
"Le Congrès pour la République (CPR) réitère son refus de toute coalition gouvernementale comportant des forces antirévolutionnaires ou impliquées avec l' ancien régime", d' après la déclaration finale du congrès national du parti présidentiel qui a enregistré certains différends au sommet de son hiérarchie menant à la démission de plusieurs dirigeants dont son secrétaire général Mohamed Abbou.
Pour Ennahdha, "l' initiative du Premier ministre Hamadi Jebali de former un gouvernement de technocrates ne répond pas aux exigences de l' actuelle étape que traverse le pays", a précisé le parti islamiste dans la déclaration finale de son Conseil de la Choura (chambre haute du parti).
D' après le président du Conseil de la Choura, le parti Ennahdha "tient à former un gouvernement politique de coalition fondé sur la légitimité du 23 octobre 2011 et ouvert à des expertises nationales engagées à réaliser les objectifs de la révolution suivant un programme politique susceptible de parachever la transition à travers la finalisation de la Constitution et l' organisation d' élections démocratiques".
Après avoir reporté sa décision définitive initialement prévue pour samedi dernier, le Chef du gouvernement tunisien Hamadi Jebali doit regrouper lundi pour la dernière fois les différents partis politiques (y compris ceux de l' opposition) dans une tentative d' avoir un consensus sur la composition de son nouveau cabinet apolitique. Une fois échoué à convaincre son propre parti Ennahdha et certains de ses alliés, M. Jebali quittera le pouvoir pour céder la place à un candidat du parti majoritaire (Ennahdha) et approfondir ainsi la crise politique que connait actuellement le pays.