La création d'une commission d'enquête sur les assassinats politiques survenus ces dernières années en Guinée-Bissau, a été la principale recommandation de la conférence nationale sur l'impunité, la justice et les droits de l' homme qui s'est terminée vendredi à Bissau.
La déclaration finale de la conférence qui a regroupé les autorités gouvernementales, judiciaires et de la société civile, souligne la nécessité d'"une réforme sérieuse et efficace dans tous les domaines dans les secteurs de la justice, de la défense, de la sécurité et de l'administration publique".
Elle recommande que la fonction de procureur de la République s' éloigne de l'arène politique comme le veut la constitution bissau-guinéenne, l'adoption d'un code de justice militaire et la ratification du protocole de la Cour africaine des Droits humains.
"Ces décisions visent à mettre un terme à l'impunité en Guinée- Bissau survenue au cours des années, en particulier après le conflit politico-militaire 1998- 99", conclut le rapport final de la conférence.
Commentant les travaux, le Secrétaire général adjoint de l'ONU aux droits de l'homme, Ivan Simonovic, a estimé que "cette conférence a établi une dynamique positive dans la lutte contre l'impunité avant les élections (présidentielles et législatives), et prépare la voie à un renforcement de l'Etat de droit après les élections".
Il a souligné que l'amnistie doit être accordée uniquement en accord avec le droit international. Il a fait remarquer à cet égard que la loi d'amnistie de 2008 "a montré que malgré tous les efforts déployés pour lutter contre l'impunité depuis 2004, le nombre d'infractions a augmenté depuis la promulgation de cette loi, y compris après le coup d'Etat en 2012, et contribué davantage à la culture de l'impunité en Guinée-Bissau".
Au cours des quinze dernières années, la situation en Guinée- Bissau a été caractérisée par des coups d'Etat récurrents, liés à des violations des droits humains, notamment des homicides à caractère politique, enlèvements, tortures, arrestations et détentions arbitraires d'opposants politiques et de représentants de la société civile, déplorent les organisations des droits de l' homme.
Elles citent notamment l'assassinat en mars 2009, du président Nino Vieira dans sa résidence privée à Bissau, quelques heures après celui du général Tagme Na Waie, chef d'état-major, tué dans l'explosion d'une bombe à l'état-major général des forces armées.
Si l'enquête sur l'assassinat du général Tagme a été bouclée, il reste maintenant le procès des présumés auteurs devant le Tribunal militaire supérieur. Quant au dossier du président Vieira, il est encore en attente.
Parmi les autres crimes non élucidés figure l'assassinat en juin 2009 du député Baciro Dabo, candidat à la présidentielle et du député Helder Proença, tous deux accusés de tentative de coup d'Etat.
En octobre 2012, suite à l'attaque de la caserne des commandos à la périphérie de Bissau, plus d'une douzaine de personnes dont des civils et militaires ont été tuées.
Certains dirigeants politiques ont également été persécutés, battus. C'est le cas de deux leaders de parti politique, Iancuba Djola Injai et Silvestre Alves, qui ont été molestés par des militaires et qui sont actuellement à l'étranger pour un traitement médical.
"Ce sont des situations de ce genre qui conduisent à dire que la Guinée-Bissau est un pays de l'impunité", concluent des analystes de droits de l'homme en marge de la conférence nationale sur l'impunité.