Pendant que la polémique enfle autour des résultats provisoires du scrutin législatif, entre l'opposition républicaine et le pouvoir, de nombreux citoyens guinéens vivent dans l'angoisse, de voir cette crise postélectorale perdurer.
Ousmane Camara, est aide-soignant dans un hôpital de la capitale guinéenne. Ce quinquagénaire quitte tous les matins son domicile situé dans la haute banlieue de Conakry, pour aller travailler dans la commune de Kaloum.
Avec cette crise postélectorale, Ousmane Camara ne cache pas son appréhension. "Je crains que la situation ne s'enlise. Car l'opposition réitère sa demande portant sur la reprise du vote, et la mouvance ne semble pas entendre les choses de cette façon. Il suffit de suivre les échanges entre les deux camps par presse interposée, pour mesurer la gravité de la situation", affirme cet infirmier gagné par le scepticisme.
Scepticisme partagé par Bocar Sy, travaillant dans le secteur de l'immobilier. Cet homme qui a roulé sa bosse dans plusieurs pays étrangers, notamment en Europe craint que la situation ne dégénère en affrontements, entre partisans du pouvoir et de l'opposition, en cas de manifestations de rue.
Scénario auquel les habitants de la capitale ont été souvent confrontés. Quand on sait que le régionalisme s'invite généralement dans le débat politique guinéen.
La psychose est perceptible dans les milieux scolaires aussi, vu la faible affluence des élèves dans les écoles, depuis l'ouverture des classes le 3 octobre dernier.
Les parents d'élèves que notre reporter a interrogés, à cause de cette morosité qui entoure la rentrée des classes au niveau du secondaire sont unanimes sur le fait que la situation était loin d'être "rassurante", pour une bonne rentrée des classes, à l'allure où vont les choses. Ils souhaitent que les acteurs politiques fassent preuve de "compromis" autour des résultats des élections, ceci pour assurer la quiétude sociale dans la cité.
C'est le même son de cloche chez de nombreux commerçants, qui ont baissé le rideau de fer de leurs commerces, depuis le 28 septembre, date du scrutin législatif. Eux aussi disent agir ainsi pour protéger leurs marchandises contre d'éventuels "pillages", en cas d'émeutes.
Des voix s'élèvent toutefois pour appeler les acteurs politiques à la retenue, les invitant à privilégier la voie du dialogue. C'est le cas notamment d'un groupe de sages de la capitale qui a invité mardi dernier la classe politique à se départir de toutes velléités bellicistes, afin d'épargner à la Guinée des violences aux conséquences "incalculables".
Le ministre de la Sécurité et de la protection civile Madifing Diané a aussi tenu à rassurer les populations, notamment les opérateurs économiques, lors d'une conférence de presse tenue mardi à Conakry, que son département prendra les mesures qui s'imposent, pour les protéger ainsi que leurs biens.
En attendant que l'implication de la communauté internationale dans la résolution de cette nouvelle crise postélectorale ne produise l'effet escompté, l'opposition campe sur sa position et réitère son appel à la reprise du scrutin.
Appel qu'elle a adressé d'ailleurs mardi à la communauté internationale, en tant que "garante selon elle de l'application de l'accord politique inter-guinéen", afin que celle-ci "use de toute son influence pour que les fraudes constatées soient reconnues et les élections reprises en conséquence".
Cette dernière tente d'arrondir les angles, à travers des recommandations faites à la CENI, et dont l'essentiel porte sur des correctifs au niveau du décompte des voix dans certaines circonscriptions, où "des irrégularités" ont été constatées par des observateurs internationaux.