Dernière mise à jour à 09h06 le 13/06
Le processus d'élaboration de la nouvelle Constitution suscite un vif intérêt en Côte d'Ivoire où des consultations entre le chef de l'Etat Alassane Ouattara et les diverses couches de la société se succèdent.
A plusieurs occasions, M. Ouattara a indiqué que ces couches socio-politiques ont une contribution importante dans l'élaboration des textes constitutionnels devant régir le pays.
L'OPPOSITION APPELLE A RECONSIDÉRER LA PROCÉDURE
A l'issue de la rencontre avec les partis politiques de l'opposition le 7 juin marquant la première étape des consultations, certains leaders de partis ont appelé le pouvoir à "reconsidérer" la procédure proposée devant aboutir à l'adoption de ce texte par référendum.
"Un certain nombres d'intervenants ont insisté sur la nécessité de reconsidérer le projet, de le repositionner dans le cadre d'une démarche démocratique et transparente", a expliqué en substance le président du Front populaire ivoirien (FPI, parti de l'ex-président Laurent Gbagbo) Pascal Nguessan Affi.
"Nous avons tous insisté sur le fait qu'il fallait adopter une démarche consensuelle, parce qu'une nouvelle constitution, c'est un contrat social avec le peuple ivoirien donc il faut donner la possibilité au peuple de s'exprimer", a renchéri la présidente de l'Union républicaine pour la démocratie (URD), Danielle Boni Claverie.
Mme Claverie a proposé la mise sur pied d'une "commission consultative" regroupant toutes les forces vives de la Nation.
LES CHEFS TRADITIONNELS POUR UN TROISIÈME MANDAT PRÉSIDENTIEL
Après l'opposition, ce fut au tour des rois et chefs traditionnels de Côte d'Ivoire de passer à la table des consultations le mercredi 8 juin.
"S'agissant des conditions d'éligibilité, nous avons pensé qu'il fallait les simplifier pour l'intérêt de la paix et mettre en avant la nationalité. Donc permettre à tout Ivoirien de naissance de pouvoir briguer la magistrature suprême", a noté le président du Directoire de la Chambre des Rois et chefs traditionnels de Côte d'Ivoire, Nanan Désiré Amon Tanoé.
Les chefs traditionnels ont, en outre, exprimé leur volonté de voir l'âge minimal pour briguer la magistrature suprême réduit de 40 à 35 ans.
Ils ont également plaidé en faveur d'une révision de la question de la limitation des mandats, proposant la possibilité d'un troisième mandat présidentiel.
"Il faudrait pouvoir coupler la réduction de l'âge avec la possibilité de que le président puisse après deux mandats, briguer un troisième", a déclaré Nanan Désiré Tanoé.
LA SOCIÉTÉ CIVILE VEUT UN "VRAI" CONTRAT SOCIAL
Dans son ensemble, la société civile qui a aussi pris part aux consultations ne veut pas d'un troisième mandat présidentiel comme proposé par les chefs traditionnels.
La majorité des leaders de la société civile ont opté pour un mandat de cinq ans renouvelable une fois, soit un total de deux mandats.
Et pour l'éligibilité, notamment concernant la disposition de l'actuelle Constitution qui demande d'être de père et de mère ivoirien, ils proposent que le candidat ait au moins un parent ivoirien.
"Nous ne voulons plus d'article confligène dans notre Constitution. Nous voulons un vrai contrat social, nous voulons le vivre en commun", a dit la présidente de la plateforme de la société civile pour l'Observation des Elections (POECI), Marie-Paul Kodjo.
"Nous avons accueilli à point nommé les innovations contenues dans les propositions du chef de l'Etat parce que nous avons dit que la Constitution de 2000 a créé beaucoup de conflits", a renchéri la présidente des femmes juristes de Côte d'Ivoire, Aimée Zébeyou.
Elle a salué le fait que les consultations actuelles menées par le chef de l'Etat "prennent en compte toutes les composantes de la Société".
A l'occasion de leur rencontre avec le chef de l'Etat dans le cadre des consultations, les religieux, eux, ont demandé que leur soit accordé un "temps de réflexion".
Pour des observateurs, les aspects de la Constitution liés aux conditions d'éligibilité sont très déterminants pour la prochaine élection présidentielle.
"Il s'agit notamment des conditions liées à la nationalité, à la filiation et à la limitation de mandats. Il y a plusieurs exemples en Afrique où des crises sont survenues sur la question d'un éventuel troisième mandat présidentiel", a souligné Michel Konan, enseignant dans une université d'Abidjan.
M. Konan a rappelé que la Côte d'Ivoire a elle aussi vécu en 1999 puis en 2002 des crises appelées "crises ivoiritaires" en 2002 en raison selon lui d'une "disposition constitutionnelle confligène".
Le processus d'élaboration d'une nouvelle Constitution ivoirienne a débuté avec la mise en place début juin d'un comité d'experts par le président Alassane Ouattara. Ces experts seront chargés de faire propositions relatives à la Constitution.
Le chef de l'Etat entreprend actuellement une série de consultations avec l'opposition politique, les leaders communautaires et religieux, la société civile, les partis de la coalition au pouvoir, dont les contributions sont également attendues.
La rédaction d'une nouvelle Constitution était une promesse de campagne d'Alassane Ouattara, réélu en octobre dernier pour un second mandat.
"Il faut une nouvelle Constitution qui doit garantir l'égalité de tous, la cohésion nationale et la stabilité de nos institutions", avait-il déclaré.
Un référendum sera organisé courant septembre-octobre prochain pour permettre aux Ivoiriens de se prononcer sur le principe d'une nouvelle Constitution.