Dernière mise à jour à 10h49 le 27/01
Dans le cockpit, Martin Tope est fier d'accueillir le journaliste après l'avoir invité à le rejoindre pour une plongée au cœur de la technologie de l'avion turbopropulseur, un des deux MA60 chinois en exploitation depuis début 2016 au Cameroun, affrété par la compagnie nationale Camair-Co pour relier Douala et Yaoundé, la métropole économique et la capitale du pays.
Dans ce voyage qu'il effectue au côté du Laotien Vixay Bouvanih, instructeur venu dispenser des formations pour le pilotage de cet appareil de "nouvelle génération", ce vétéran des airs camerounais avec à son palmarès "11.000 heures de vols" est à l'aise dans son rôle de commandant de bord totalisant quelque "800 heures de vols sur ces avions depuis l'année dernière", renseigne-t-il.
Ce propos résume le bilan d'un an d'activités "sans incident" des deux aéronefs d'une cinquantaine de places acquis par le gouvernement camerounais auprès du groupe aéronautique chinois Avic International, pour renforcer la flotte de la compagnie aérienne nationale, créée en 2011 sur les cendres de la défunte Cameroon Airlines (Camair).
Livrés en avril 2015, ces MA60 étaient restés cloués au sol jusqu'au 23 janvier 2016, date de leurs vols inauguraux décidés par le ministre des Transports Edgar, alors nouvellement nommé, pour faire taire une "controverse injustifiée" orchestrée par quelques personnes aux motivations inavouées pour remettre en cause la qualité technique de ces avions.
"Or, pendant près de trois ans, le prototype qui avait été affecté au sein de l'armée de l'air fonctionnait de manière satisfaisante", a expliqué dans une interview à la presse Edgar Alain Mebe Ngo'o, pour justifier sa décision située en phase avec les discussions menées par le président Paul Biya lors de sa récente visite en Chine en juillet 2011, concernant ce projet.
Résultat de ces discussions, le gouvernement chinois avait offert à titre gracieux au pouvoir camerounais un premier MA60, affecté pour les opérations de l'armée de l'air après sa livraison en novembre 2012.
"A ce jour, informe le ministre, la présence de ces avions a permis de renforcer la flotte de Camair-Co, et surtout de densifier les vols domestiques. J'en veux pour preuve son exploitation déjà permanente sur la desserte Yaoundé-Douala et l'inauguration le 14 octobre 2016 de la destination vers Bafoussam. La desserte d'autres villes est envisagée, notamment Bamenda et Bertoua".
De l'avis du directeur commercial de Camair-Co, Jean Claude Nkeng-Peh, "aujourd'hui les taux de remplissage s'améliorent de jour en jour. Ce qui montre qu'il y a un intérêt particulier de la part de la clientèle", une clientèle "très impressionnée" par le confort des aéronefs.
"Vous avez ce qu'on appelle le +pitch+, c'est-à-dire l'espace entre deux sièges qui est particulièrement grand. C'est-à-dire que les personnes qui ont 1,80 mètre, 1,90 mètre sont à l'aise à bord de cet appareil", démontre le responsable.
C'est une appréciation partagée par les clients fidèles de la compagnie aérienne nationale du Cameroun, à l'exemple de Marie Noëlle Mvondo, rencontrée à bord d'un des MA60 sur la ligne Douala-Yaoundé.
"Je voyage avec ces avions depuis des mois, principalement entre Yaoundé et Douala. Sur la ligne de Bafoussam, j'ai déjà effectué trois voyages à bord. Ce sont des avions confortables", s'est félicité la jeune femme.
Confortablement assis à la cabine de pilotage, le commandant de bord Martin Tope, en réaction à son tour à la campagne d'intoxication, que ces appareils sont le fruit d'une technologie de pointe associant des apports extérieurs.
"Les moteurs surtout sont canadiens, la plupart des avioniques sont américains. Donc, les Chinois ont réussi l'exploit d'assembler cet avion, mais il est chinois et cet avion répond aux normes de l'aviation civile internationale", souligne-t-il.
En visite au Cameroun, Xu Bo, vice-président d'Avic International, s'est réjoui lui aussi de l'impact des deux appareils sur le transport aérien dans le pays d'Afrique centrale. "Nous pensons qu'à l'heure actuelle les pilotes et les ingénieurs de Camair-Co ont une meilleure connaissance de ces appareils qu'auparavant", assure-t-il.
Fort de 30 ans de présence en Afrique, le groupe aéronautique créé en 1979 mentionne des relations d'affaires avec une vingtaine de pays tels le Zimbabwe, le Congo, la Zambie, le Kenya et l'Egypte par exemple. Pour une exploitation optimale de ces avions au Cameroun, il a installé une équipe technique à Douala, la métropole économique, pour leur maintenance quotidienne.
"Dans le même temps, nous avons un dialogue encourageant avec Camair-Co. Nous prévoyons de mettre en place conjointement un magasin de stockage de pièces de rechange à Douala pour réduire les délais de livraison de ces pièces. Nous avons aussi introduit avec succès des équipages chinois pour soutenir l'exploitation des MA60", indique M. Xu.
Selon lui, l'objectif d'Avic n'est pas seulement d'introduire les avions chinois sur le marché africain. "Nous travaillons aussi avec les gouvernements africains afin de renforcer leurs capacités dans le domaine de l'aviation civile. Cela consiste par exemple à former davantage de personnels, à améliorer la qualité des infrastructures aéroportuaires et à créer des centres de maintenance".
En Afrique du Sud, le groupe chinois a mis sur pied un important centre de formation de pilotes. "Chaque année, nous sommes en mesure de former plus de 200 pilotes pour les avions de ligne", précise le vice-président.
Avec les autorités camerounaises, des discussions sont aussi en cours pour la création d'une école de formation en aviation, pour permettre de former des jeunes ingénieurs et techniciens professionnels, pour des métiers comme le management des aéroports, le contrôle du trafic aérien et la maintenance.
C'est une évolution positive de la coopération sino-camerounaise, développée depuis 1971, se réjouit pour sa part l'ambassadeur de Chine au Cameroun, Wei Wenhua.
"Depuis l'établissement des relations diplomatiques sino-camerounaises il y a 46 ans, détaille le diplomate, la Chine et le Cameroun ont maintenu de très bonnes relations bilatérales, avec la coopération entre nos deux pays obtenant des résultats remarquables en matière de transport, d'exploitation des ressources hydriques, de services sanitaires, d'éducation, de finance, etc."
"Il y a un grand potentiel de développement et une belle perspective pour la coopération sino-camerounaise dans l'aviation régionale, la construction d'aéroports, la formation du personnel, le transfert de technologie, etc. La Chine continuera à accompagner le Cameroun dans son acheminement vers l'émergence", annonce-t-il.