Dernière mise à jour à 08h43 le 08/10
Les violations de l'espace aérien turc par des avions de combat russes déployés en Syrie ont tiré la sonnette d'alarme de la Turquie, poussant l'OTAN à émettre des avertissements contre la Russie.
Mardi, l'armée turque a publié un communiqué dans lequel il a fait savoir qu'un escadron de F16 en patrouille a été encerclé par un MIG29 russe au-dessus de la frontière turco-syrienne. Les F16 ont également été visés par des batteries de missiles surface-à-air déployées en Syrie.
L'incident a suivi les deux violations par la Russie de l'espace aérien au cours du week-end.
Un bombardier Su-30 a franchi la frontière syro-turque pendant quelques secondes samedi, poussant les F16 turcs à intervenir. La Russie a fait savoir que cette incursion était une erreur liée aux conditions climatiques défavorables, ajoutant que d'autres violations font l'objet d'une enquête.
Mais l'OTAN a déclaré que les violations russes semblaient délibérées.
Mardi, le secrétaire-général de l'OTAN, Jens Stoltenberg, a qualifié la violation de l'espace aérien d'inacceptable. "Cela ne ressemble pas à un accident, et nous en avons vu au cours du week-end", a souligné M. Stoltenberg.
Les ministres de la Défense de l'OTAN se réuniront jeudi à Bruxelles pour parler des mesures de l'OTAN pour répondre aux actions russes dans un pays membre.
"La Russie et la Turquie devraient se montrer prudentes dans leurs actions et travailler pour apaiser les tensions", a insisté Serkan Demirtas, analyste turc.
Soulignant que la Syrie est devenue un champ de batail dangereux entre la coalition américaine et le camp russe, il a déclaré: "Tout développement non souhaité et non intentionnel pourrait entraîner des conséquences graves qui auraient sans aucun doute des effets énormes sur la Turquie également".
La Turquie, qui partage une frontière de 900 km avec la Syrie, envoie fréquemment des avions intercepter les violations de l'espace aérien.
En février 2014, un avion de combat F16 turc a abattu un MIG23 syrien qui avait violé l'espace aérien turc.
En septembre 2013, des avions de guerre turcs ont abattu un hélicoptère syrien après que ce dernier a traversé l'espace aérien turc.
Pour certains analystes, les retombées des récentes tensions seront lourdes sur les relations entre la Turquie et la Russie.
Yasar Yakis, ancien ministre turc des Affaires étrangères, pense que la présence de l'armée russe et les attaques contre les groupes d'opposition soutenus par Ankara auront un impact profond sur la Turquie.
"La Turquie et la Russie ont décidé de cloisonner leurs relations et de ne pas laisser les problèmes dans une zone affecter négativement la coopération dans l'autre", a-t-il indiqué. "Mais à cause de ce conflit d'intérêt, les retombées politiques et les relations bilatérales tendues semblent inévitables".
La Turquie entretient des relations commerciales fortes avec la Russie et dépend beaucoup de Moscou pour ses livraisons de gaz naturel. "Les retombées d'un affrontement militaire sérieux entre la Russie et la Turquie ont été immédiatement abordées, dans les heures qui ont suivi", a rapporté la journaliste Gunes Komurculer du Hurriyet Daily News.
POSITIONS FERMES DES DIRIGEANTS TURCS
Pendant sa visite officielle en Belgique, le président turc Recep Tayyip Erdogan a mis en garde mardi que la Turquie ne se montrerait pas patiente face à ces violations. Il a ajouté que la Russie perdrait beaucoup de la rupture de ses relations avec la Turquie.
Les remarques de M. Erdogan font suite aux déclarations du Premier ministre turc, Ahmet Davutoglu, qui a mis en garde lundi que les règles d'engagement s'appliquent à tous les avions, qu'ils soient syriens ou russes, laissant entendre que les avions de combat pouvaient aussi être abattus.
Le vice-ministre russe de la Défense, Anatoly Antonov, a déclaré mardi que Moscou accueillerait bien une délégation russe pour discuter et éviter les malentendus en Syrie.
L'ambassadeur russe à Ankara a été convoqué lundi pour transmettre les protestations de la Turquie à la Russie.
L'implication de l'armée russe en Syrie est une mauvaise nouvelle pour l'idée longtemps défendue par la Turquie de mise en place d'une zone sûre en Syrie afin de gérer les réfugiés et protéger l'opposition.
"Maintenant que la Russie est lourdement impliquée dans le conflit syrien du côté du régime Assad, la zone de non-vol soutenue par la Turquie en Syrie est devenue un rêve, tout comme l'objectif d'Ankara de renverser Assad", a déclaré Lale Kemal, analyste sécuritaire basée à Ankara.
Elle a par ailleurs souligné que les actions russes en Syrie pourraient bien aider à accentuer l'importance de la Turquie pour l'OTAN en Méditerranée orientale.