Dernière mise à jour à 14h13 le 22/08
L'insistance des Etats-Unis à déployer leur système antimissile THAAD en Corée du Sud peut être considérée comme la porte ouverte à une nouvelle guerre froide, estiment des experts égyptiens.
Une telle décision vise principalement à semer le trouble autour de la Russie et de la Chine avec pour objectif le maintien de la domination américaine sur le monde, selon les experts.
"L'insistance des Etats-Unis à déployer un bouclier antimissile en Asie du Nord-Est, notamment en Corée du Sud, signifie le début d'une nouvelle guerre froide", déclare à Xinhua l'ancien vice-ministre égyptien des Affaires étrangères Ahmed el-Ghamrawi.
Il est clair qu'il existe une tentative d'encercler la Chine et la Russie via le déploiement autour d'elles de boucliers antimissiles de haute technologie, ajoute-t-il.
"Les dirigeants américains estiment que les deux pays représentent une menace économique, politique et militaire pour les Etats-Unis en particulier et l'Occident en général. C'est pourquoi ils ont décidé de prendre cette mesure", explique-t-il.
M. Ghamrawi pense que les Etats-Unis commencent à prendre la mesure du déclin de leur domination, de leur force et de leur économie, alors que la Chine et la Russie jouent des rôles de plus en plus importants. Ceci a donc incité Washington à agir rapidement en semant le trouble autour de Beijing et de Moscou.
Séoul et Washington ont annoncé le mois dernier leur accord sur le déploiement d'une batterie THAAD (Terminal High Altitude Area Defense) dans la région de Seongju, à quelque 250 km au sud-est de la capitale sud-coréenne, d'ici fin de l'année prochaine, comme moyen de lutter contre les éventuelles menaces nucléaires de la République populaire démocratique de Corée (RPDC).
Le système THAAD, développé par Lockheed Martin, est conçu pour abattre tout missile balistique à courte et moyenne portée en phase de vol terminale. Il comprend six lanceurs mobiles, 48 missiles intercepteurs, des radars et un système de tir, le tout évalué à 1,3 milliard de dollars.
Le déploiement du système THAAD en Corée du Sud ne constitue qu'une partie du système antimissile global des Etats-Unis.
La Chine a exprimé son fort mécontentement et son opposition résolue au déploiement du THAAD sur le territoire sud-coréen, le jugeant préjudiciable à ses intérêts de sécurité et estimant que cela allait briser l'équilibre stratégique dans la région. De son côté, la Russie a donné une réponse militaire en déployant une batterie de missiles dans son district fédéral extrême-oriental.
Selon M. Ghamrawi, Washington ne cherche pas à entrer en confrontation directe avec la Chine et la Russie, mais pousse ses alliés à jouer ce rôle en forçant la Corée du Sud à déployer le système THAAD sur son sol et en incitant les Philippines et l'Indonésie à attiser la crise de la mer de Chine méridionale.
"Les Etats-Unis et la Corée du Sud annoncent que le système antimissile THAAD est officiellement destiné à contrer les missiles de la RPDC, mais la vérité est que ce système est destiné à contrer la Chine", souligne l'ancien diplomate égyptien.
Les Etats-Unis essayaient depuis 2012 d'installer en Corée du Sud le système THAAD qui, selon les experts, a une efficacité limitée face aux missiles de la RPDC.
Sur le plan technique, le THAAD est en effet conçu pour abattre des missiles à une altitude relativement élevée, entre 40 et 150km, mais les missiles de la RPDC volent à une altitude inférieure d'environ 20km et ne pourront pas être interceptées par le THAAD.
"La Chine ne sera pas entraînée dans une guerre. Elle est une grande économie et est désireuse de conserver cette économie en pleine croissance. En outre, la Chine préfère toujours résoudre pacifiquement les problèmes", estime M. Ghamrawi.
Saïd Lawendy, expert en relations internationales au Centre Al-Ahram pour les études politiques et stratégiques, pense lui qu'une nouvelle guerre froide est imminente en Asie du Nord-est.
"C'est une guerre froide, mais pas avec la même férocité que celle dans les années 50 et 60 du siècle dernier. Les Etats-Unis, agissant pour leur propre bénéfice, agissent par procuration en incitant les pays de la région à contrer la Chine et la Russie", analyse-t-il.
Pour M. Lawendy, les agissements américains en Asie du Nord-est risquent de bloquer les tentatives régionales visant à contenir les tensions avec la RPDC.
"De telles actions peuvent conduire les pays de la région à chercher des solutions militaires, ce qui constitue une menace dangereuse pour toute la région", a-t-il ajouté.