Dernière mise à jour à 10h48 le 15/10
Les déclarations critiques du président français François Hollande sur la justice, révélées par deux journalistes français dans un livre, font polémique depuis jeudi dans le domaine politique en France.
Dans cet ouvrage intitulé, "Un président ne devrait pas dire ça" et paru jeudi aux éditions Stock, le président français déclare à propos des écoutes téléphoniques de Nicolas Sarkozy que "s'il n'y a rien dans le dossier, c'est choquant, c'est vrai. C'est hélas le comportement de la justice".
François Hollande poursuit ses confidences en qualifiant la justice d'institution de "lâcheté". "Cette institution qui est une institution de lâcheté (...) Parce que c'est ça, tous ces procureurs, tous ces hauts magistrats, on se planque, on joue les vertueux (...) On n'aime pas le politique. La justice n'aime pas le politique", a-t-il confié aux deux journalistes.
Des propos qui ont vite fait réagir de hauts magistrats, le Conseil supérieur de la magistrature, des syndicats ainsi que plusieurs responsables politiques.
Le procureur de la Cour de cassation, Jean-Claude Marin, a qualifié jeudi lors de l'audience solennelle de la Cour de cassation les propos de François Hollande de "nouvelle humiliation" de la justice.
"Que peuvent aujourd'hui penser les français lorsque de tels propos sont tenus sur leur justice par la plus haute autorité de l'Etat?", s'interroge M. Marin.
Il devient donc incontournable selon ce magistrat de "poser et de régler sans ambiguïté, et loin de toute posture partisane", la question de l'ordonnancement des institutions en France et de la réelle indépendance de l'autorité judiciaire.
Bertrand Louvel, président de la Cour de cassation, indique aussi que "ces outrances" à l'encontre du corps judiciaire de la part des pouvoirs publics pose un problème institutionnel.
Pourtant, le chef de l'Etat français entretient de bonne relation avec la justice, contrairement à son prédécesseur Nicolas Sarkozy. Mais cette "imagination qu'on avait d'une relative considération s'écroule", a déclaré sur BFMTV la présidente du Syndicat de la magistrature Clarisse Taron, pour qui l'institution judiciaire soufflait depuis 2012, car ne "subissant plus comme avant des pressions quasi quotidiennes".
Dans un communiqué rendu public, le Conseil supérieur de la magistrature qualifie les déclarations de M. Hollande de "dangereux et injustes, qui abaissent une institution clef" de la République et "méconnaissent l'engagement de femmes et d'hommes qui (...) servent la justice avec courage et dévouement".
Les responsables politiques, notamment les opposants de droite, ont également vivement critiqué les propos du président français. Le député Eric Ciotti (LR), porte-parole du candidat Nicolas Sarkozy, a dénoncé des propos "graves et dangereux" pour le pays.
Tandis qu'Alain Juppé, également candidat à la primaire de la droite, indique dans un communiqué que si M. Hollande a réellement tenu ces propos, "il a manqué gravement aux devoirs de sa fonction et a démontré une nouvelle fois qu'il n'est pas à la hauteur de sa charge".
Face à l'ampleur de la polémique, le Premier ministre Manuel Valls en visite officielle au Canada a réagi via la presse française. Selon lui, rien n'a été fait ni contre la justice ni contre les juges depuis le quinquennat de François Hollande, contrairement à son prédécesseur Nicolas Sarkozy.
"L'indépendance de la justice, l'absence de toute intervention politique dans les affaires individuelles, ont été la marque de l'action de François Hollande, du gouvernement et des gardes des Sceaux", a rappelé M. Valls.
Dans sa longue confidence aux deux journalistes, François Hollande a également abordé, entre autres, l'immigration, et indique "qu'il y a trop d'arrivées" en France. Sur l'islam, il note : "qu'il y a un problème avec l'islam, c'est vrai, nul n'en doute".