La multiplication des actes terroristes contre les casques bleus de la Mission des Nations Unies au Mali (MINUSMA) repose avec acuité la nécessité de trouver une solution pour la stabilisation du nord du Mali, estiment les spécialistes.
En 16 mois, les casques bleus de l'ONU ont enregistré 30 morts et 65 blessés dans l'explosion de mines, des attentats ou des tirs de roquettes ou d'obus, attribués à des groupes islamistes armés qui ont apparemment repris du poils de la bête, après avoir été chassés du nord Mali par la force française Serval.
Cette situation s'explique, selon Hervé Ladsous, secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix de l'ONU, par la diminution progressive du dispositif des forces françaises, mais aussi du retrait, pour l'essentiel, des forces maliennes de sécurité du nord, sans oublier la situation dans le sud de la Lybie qui est probablement un facteur qui joue un rôle.
Ainsi, a-t-il souligné, la MINUSMA "n'est plus dans un contexte de maintien de la paix au Mali", puisqu'elle "ne fait plus face à une menace asymétrique" de la part "des groupes extrémistes, djihadistes, voire des trafiquants de tout genre".
Pour faire face, les Nations unies vont renforcer leurs bases et leurs protections, en déployant davantage d'engins contre les mines et les explosifs, ainsi qu'une nouvelle escadrille d' hélicoptères d'attaque et des drones de surveillance aérienne à longue portée, a-t-il révélé.
Aujourd'hui, affirment les spécialistes, l'objectif des terroristes est de semer la peur et le désordre dans les rangs de la force onusienne.
C'est pourquoi le gouvernement malien et la communauté internationale s'accordent sur un changement de stratégie de contrer la réorganisation des islamistes qui profitent du chaos régnant actuellement en Libye.
"Toutes les récentes attaques contre la MINUSMA ont été perpétrées avec des armes et des minutions venues de la Libye", indique un officier de l'armée malienne en service dans le nord du Mali, qui a requis l'anonymat.
Les spécialistes interrogés par Xinhua estiment qu'il est " utopique" d'espérer que des mouvements, comme le MNLA (Mouvement de Libération de l'Azawad, rebelle), "se démarquent" réellement " des groupes terroristes et autres narcotrafiquants" comme le souhaitent Bamako et les Nations unies.
"Au lieu d'exiger la coopération des groupes armés dans la lutte contre le terrorisme, il fallait plutôt exiger le désarmement de tous les groupes armés pour que les terroristes soient connus de tous", soutient Khalifa A. Maïga, un consultant indépendant qui a travaillé pour de nombreuses ONG dans le nord du Mali d'où il est originaire.
"Le MNLA n'existe militairement que par la volonté de ces terroristes et narcotrafiquants qui lui fournissent les hommes, les armes et les moyens financiers et logistiques", analyse Kader Toé, spécialiste des questions de sécurité dans le septentrion malien.
Une analyse partagée par le conseiller militaire d'une chancellerie africaine à Bamako, pour qui "Kidal est devenu un sanctuaire des terroristes parce que la France en a fait un no man' s land interdit à l'armée et aux forces de sécurité du Mali.
Quoi qu'il en soit, la révision du mandat de la MINUSMA est nécessaire, du point de vue du gouvernement malien. Il faut doter la mission onusienne d'une force d'intervention rapide capable de lutter efficacement contre les éléments terroristes, a proposé au Conseil de sécurité de l'ONU, le ministre malien des Affaires étrangères, Abdoulaye Diop.
Face à la nouvelle donne, l'armée française a récemment annoncé l'implantation d'une nouvelle base temporaire au nord du Niger, pour couper la route à toutes sortes de trafic et empêcher le mouvement des groupes terroristes opérant sur la bande qui va du sud de la Libye à la Mauritanie.
Mais, les observateurs, comme Alexis Kalambry, consultant en communication politique, doutent de l'efficacité sur le long terme d'un tel dispositif. Il estime que cette base "est appelée de tous les voeux aujourd'hui parce qu'une intervention directe en Libye n' est pas évidente".
"Les alliés préféreront une guerre par procuration (..) Mais, je ne pense pas qu'elle soit efficace sur le long terme Même si les flux diminuent à certains niveaux, les sanctuaires terroristes demeureront et il faudra des actions d'envergure pour les détruire ", précise-t-il.