Dernière mise à jour à 08h04 le 19/07
La visite d'Etat au Sénégal du président chinois Xi Jinping va énormément promouvoir les échanges culturels entre la Chine et le Sénégal, qui n'ont cessé de s'intensifier depuis une décennie, prédit Liu Chengfu, vice-président permanent de la Société d'études africaines de Chine, dans une interview récemment accordée à Xinhua.
Célèbre professeur de français à l'Université de Nanjing (sud-est de la Chine) et chercheur éminent sur la culture africaine, M. Liu a visité plusieurs pays africains, dont le Sénégal, et a eu des échanges profonds avec des collègues africains.
"J'apprécie grandement la culture et la civilisation sénégalaises. Ces dernières années, j'ai commencé à diriger la rédaction des thèses de mes élèves, tout en choisissant quelques grands écrivains sénégalais tels que Mariama Bâ et Léopold Sédar Senghor", confie-t-il, ajoutant que Mariama Bâ est une des femmes écrivains qu'il préfère. "Elle a écrit seulement deux romans -Une si longue lettre et Un chant écarlate- mais ce qu'elle a écrit m'a fortement impressionné. J'adore non seulement son style, mais aussi sa pensée et ses réflexions sur le destin des femmes africaines".
"Bien sûr, quand on parle de littérature sénégalaise, il ne faut jamais oublier Léopold Sédar Senghor. Ce président-poète a si bien chanté la civilisation de sa patrie. Sa poésie, fondée sur le chant incantatoire, est construite dans le but de créer une civilisation de l'universel, fédérant les traditions par-delà leurs différences. Avec Aimé Césaire, il a créé le concept de la 'négritude', tout en soulignant la tradition glorieuse des subsahariens. Sous sa plume, l'image des femmes noires est toujours positive et elles sont même devenues des diamants noirs, tout comme sous la plume du symboliste Baudelaire", analyse-t-il.
Concernant les échanges culturels sino-sénégalais, M. Liu note qu'il y en a eu de plus en plus entre étudiants et professeurs, davantage de séminaires et de conférences entre les deux pays. "Il faut avouer que les Chinois ne connaissent pas la littérature sénégalaise, mais ça commence. Par exemple, Une si longue lettre, roman de Mariama Bâ, a déjà été traduit en chinois par mon élève Wang Ling", a-t-il noté, soulignant qu'"avec le temps, je suis sûr que les échanges culturels entre la Chine et le Sénégal, sous différentes formes, tels que des visites inter-universitaires réciproques, une coopération scientifique, des traductions littéraires, des envois d'étudiants, vont se développer en profondeur avec la visite au Sénégal du président Xi Jinping".
Il faut noter que l'Institut Confucius de l'Université de Dakar, fondé en décembre 2012, a déjà joué un rôle moteur sur le plan des échanges culturels, permettant à de jeunes Sénégalais de connaître la Chine et d'apprendre sa culture, et sert de plateforme d'échanges, surtout en sciences humaines et sociales, ce qui va nourrir davantage la fusion culturelle et sentimentale entre les deux peuples.
Bien que les échanges littéraires ne soient pas nombreux aujourd'hui entre la Chine et le Sénégal, les perspectives seront certainement positives à l'avenir, assure Liu Chengfu, "car les grands penseurs méritent nos réfle
ons et nos études approfondies, surtout pour connaître le passé et le présent de leur grand pays et prévoir son futur".
Bien sûr, s'il y a un meilleur mécanisme d'échange pour les professeurs ou les étudiants, davantage de chances d'obtenir des bourses pour participer aux activités académiques et de plus en plus d'oeuvres traduites, les échanges littéraires entre la Chine et le Sénégal seront plus satisfaisants. "Avec nos efforts, j'espère qu'un jour les Chinois connaîtront davantage d'écrivains sénégalais et les Sénégalais davantage d'écrivains chinois", confie-t-il.
Durant son séjour à Dakar en 2015, Liu Chengfu s'est dit très impressionné par l'attitude et la position des chercheurs sénégalais envers la Chine. Ils ont beaucoup apprécié l'aide et les investissements qu'elle a apportés à leur pays, chérissant l'amitié bilatérale.
En Chine, les départements de français de certaines universités commencent à dispenser des cours sur l'histoire et la civilisation des pays francophones subsahariens. "On dit souvent que le XXIe siècle est le siècle des Chinois, c'est aussi celui des Africains", martèle M. Liu. Avec la "fièvre" de l'Afrique, des dizaines de centres de recherche africains ont été créés en Chine, notamment par l'Université de Beijing et l'Université de Nanjing. Ils vont jouer un rôle de pont pour assurer les échanges culturels entre la Chine et les pays africains, notamment francophones.