Dernière mise à jour à 08h46 le 18/05
Des chercheurs utilisant la technologie numérique sur deux pages recouvertes de papier kraft du journal d'Anne Frank y ont découvert des passages comportant des passages inédits bien éloignés du ton général du célèbre livre, et notamment quatre blagues salaces et des explications franches sur le sexe, la contraception et la prostitution. « Quiconque lit les passages qui ont été découverts sera incapable de réprimer un sourire », a commenté Frank van Vree, directeur de l'Institut néerlandais pour la guerre, l'Holocauste et les études sur le génocide. « Les blagues cochonnes sont classiques chez les enfants qui grandissent. Elles montrent clairement qu'Anne, avec tous ses dons, était avant tout une jeune fille comme les autres ».
Anne, alors âgée de 13 ans, écrivit ces deux pages le 28 septembre 1942, moins de trois mois après qu'elle, sa famille et une autre famille juive se soient cachées des nazis dans une annexe secrète derrière une maison au bord d'un canal d'Amsterdam. Plus tard, sans qu'on sache pourquoi, elle les a recouvertes de papier kraft, et leur contenu est resté un mystère pendant des décennies. Peut-être est-ce parce que la jeune fille elle-même décrit les blagues qui y figurent comme « sales » et qu'y figure aussi une explication du développement sexuel des femmes, du sexe, de la contraception et de la prostitution. « Elles nous rapprochent encore plus de la jeune fille et de l'écrivain Anne Frank », a déclaré Ronald Leopold, le directeur exécutif du Musée de la maison Anne Frank.
D'après les experts, le texte nouvellement découvert, lorsqu'il est étudié avec le reste de son journal, en révèle davantage sur le développement d'Anne en tant qu'écrivain que sur son intérêt pour le sexe, d'autant plus que, selon M. Leopold, ces mots sont similaires à d'autres passages traitant du sexe qui avaient déjà été publiés. Cependant, ils fournissent un exemple précoce de la façon dont Anne « crée une situation fictive qui lui permet d'aborder plus facilement les sujets sensibles dont elle parle », a-t-il ajouté. Dans son journal, par exemple, elle adresse quelques lignes à une amie fictive nommée Kitty.
Le déchiffrement a été effectué par des chercheurs du musée Anne Frank, de l'Institut d'études sur la guerre, l'Holocauste et le génocide et de l'Institut Huygens pour l'histoire des Pays-Bas. Ils ont photographié les pages, éclairées à contre-jour par un flash, puis ont utilisé un logiciel de traitement d'image pour déchiffrer les mots, qui étaient difficiles à lire parce qu'ils étaient mélangés avec l'écriture au verso des pages. Dans le passage sur le sexe, Anne décrit comment une jeune femme connaît ses premières règles vers l'âge de 14 ans, disant que c'est « un signe qu'elle est mûre pour avoir des relations avec un homme mais qu'on ne le fait pas avant de se marier ». Au sujet de la prostitution, elle a écrit : « Tous les hommes, s'ils sont normaux, vont avec les femmes, des femmes comme ça les accostent dans la rue et ensuite ils vont ensemble. À Paris, ils ont de grandes maisons pour ça. Papa y est allé ».
Anne a écrit son journal pendant qu'elle et sa famille se cachaient, ce qui a duré pendant plus de deux ans. La famille a reçu de la nourriture et d'autres produits essentiels de la part d'un groupe d'aides très soudés, jusqu'au 4 août 1944, date à laquelle ils furent découverts et finalement déportés à Auschwitz. Seul le père d'Anne, Otto Frank, a survécu à la guerre. Anne et sa sœur sont mortes dans le camp de Bergen-Belsen. Anne avait alors 15 ans.