Dernière mise à jour à 08h42 le 20/04
Après les syndicats des travailleurs, les organisations de jeunesses et une partie de la gauche qui manifestent depuis plus d'un mois contre le projet de loi Travail, malgré les modifications apportées au texte, au tour du Mouvement des entreprises de France (MEDEF) de menacer d'abandonner ce projet.
Selon le patronat français, le projet de loi Travail, à force d'être amélioré, s'est éloigné de son objectif, il exige donc le retour à la case départ, c'est-à-dire une version plus libérale du texte, afin de "simplifier le code et de relancer l'emploi".
"Nous avons atteint aujourd'hui notre point de rupture, si rien ne bouge rapidement sur ce texte dans les trois semaines qui viennent, nous en tirerons les conséquences et le gouvernement et les députés récolteront ce qu'ils auront semé", a menacé mardi lors d'une conférence de presse, le président du MEDEF Pierre Gattaz.
Et les conséquences seront entre autres une demande "officielle du retrait du texte et au-delà de ça, je pense que le dialogue social institutionnel risque d'en pâtir beaucoup et que nous demanderons sans doute la suspension des négociations sur l'assurance chômage", a ajouté M. Gattaz.
"C'est les entreprises qui créent l'emploi. Je suis juste le porte-parole de tous les entrepreneurs que je vois - petits, moyens et grands employeurs - qui disent autant la version 1 du texte était pas mal, elle allait dans le bon sens, qu'on aurait pu être susceptible de faire quelque chose comme de débloquer sans doute un peu d'emploi, mais aujourd'hui la version 3 du texte n'est pas acceptable", a tranché le président du MEDEF.
"On ne peut pas comprendre des expressions comme ultimatum, c'est assez inacceptable", a réagi sur France 2 le porte-parole du gouvernement Staphane Le Foll. Quant au porte-parole du PS, Olivier Faure, il assimile cet ultimatum de M. Gattaz à une prise d'otage des chômeurs.
"Cet ultimatum est surtout une prise d'otage des chômeurs français et c'est la pire façon d'assumer ses responsabilités. L'image du patronat que personne ne peut accepter c'est le patronat donneur de leçons, pas capable de négocier, toujours dans les ultimatums, dans le bras de fer mais jamais dans la concession réciproque. Ce qu'il veut supprimer aujourd'hui c'est les acquis sociaux nouveaux de la loi El khomri et il ne peut en être question", a déclaré M. Faure sur BFMTV.
Parmi les modifications qui expliquent la colère du patronat, figure la surtaxassion des CDD, obtenue par les organisations de jeunesses au sortir de leur dernière rencontre avec le Premier ministre français Manuel Valls.
M. Valls a en effet décidé lors de cette rencontre, de mieux accompagner les jeunes vers l'emploi en leur permettant d'obtenir rapidement un CDI. Pour y arriver, il a estimé qu'il faut aller plus loin en encadrant le recours abusif aux contrats courts.
"Un amendement au projet de loi Travail sera donc déposé, rendant obligatoire la modulation des cotisations patronales d'assurance chômage pour renchérir les contrats courts : les employeurs qui font le choix d'embaucher en CDD, et a fortiori en contrat de très courte durée, devront payer plus de cotisations, au bénéfice de l'assurance chômage", avait déclaré M. Valls.
Le gouvernement avait déjà procédé à une première modification du texte initial notamment sur l'allongement du temps de travail, l'assouplissement du licenciement économique et le plafonnement des indemnités prud'homales, fortement contestés par les syndicats des travailleurs, les organisations sociales et certains responsables politiques de gauche.
Dans la nouvelle version qui a été présentée par M. Valls en début mars, le gouvernement renonce par exemple, au plafonnement des indemnités prud'homales qui prévoit qu'en cas de licenciement abusif, les indemnités des salariés seront plafonnés et calculés en fonction de leur ancienneté dans l'entreprise, et propose dans le texte "corrigé" un barème indicatif. Ou encore que le juge pourra, contrairement à ce qui était prévu, apprécier en cas de litige entre l'employeur et le salarié, le motif de licenciement économique etc. Autant de modifications qui éloignent le projet de loi Travail de son ambition initiale, selon les employeurs.