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France: quand l'affaire Théo prend une tournure politique

Xinhua | 24.02.2017 08h18

La violente interpellation de Théo, un jeune homme de 22 ans originaire d'Aulnay-sous-bois, dans la banlieue parisienne, par quatre policiers lors d'un simple contrôle de routine le 2 février, a depuis pris une tournure politique, avec la mobilisation d'associations contre le racisme et de personnalités de différents domaines (sport, musique, cinéma...), mais aussi de partis politiques qui ont clairement pris position sur la question, à seulement deux mois de la présidentielle.

L'Affaire Théo continue de mobiliser. Des milliers de personnes ont répondu samedi dernier à l'appel à manifester lancé par SOS Racisme, Cran, la Ligue des droits de l'Homme, des syndicats (CFDT, CGT, FSU) et des organisations lycéennes et étudiantes (FIDL, UNEF, UNL ou encore FAGE). Entre 2.300 personnes selon la police et 4.000 à 5.000 personnes selon les organisateurs se sont rassemblées sur la place de la République à Paris pour dénoncer les violences policières et réclamer justice pour Théo.

Parmi les manifestants figurent des hommes politiques comme Jean-Luc Mélenchon, candidat de la France insoumise à l'élection présidentielle, et Noël Mamère, député écologiste, mais aussi l'ancien footballeur français Lilian Thuram et le rappeur et acteur Mokobé Traoré.

"L'affaire Théo n'est pas qu'un fait divers, c'est un problème structurel de violences policières que la France doit avoir la maturité de traiter", a déclaré le président de SOS Racisme, Dominique Sopo, à la presse. D'autres manifestations ont eu lieu le même jour à Rennes, Nice, Le Mans, Poitiers, Montpellier, Dijon, Nantes, Angers, La Rochelle et Avignon avec le même mot d'ordre : "Contre la violence policière" et "Justice pour Théo".

Les associations de lutte contre le racisme ont été reçues cinq jours avant leur manifestation par le Premier ministre Bernard Cazeneuve. Une rencontre au cours de laquelle M. Sopo et ses homologues ont notamment réclamé la généralisation des caméras-piétons, la limitation des contrôles au faciès et la mise en place de récépissés de contrôle.

Cette violence policière, qui a coûté à Théo deux semaines d'hospitalisation et une prescription de 60 jours d'incapacité totale de travail, a également fait réagir des artistes et sportifs français de renommée internationale.

Dans une tribune publiée le 15 février par le journal Libération, des personnalités telles qu'Omar Sy, Patrick Bruel, Eric Cantona, Yannick Noah, Yvan Le Bolloc'h demandent de "meilleures formations pour nos jeunes policiers, le retour de la police de proximité et une vigilance accrue lors des recrutements".

Ils qualifient les quatre policiers, mis en examen pour "violence volontaire", dont un pour "viol", de "monstres qui ne peuvent être associés aux forces de l'ordre qui nous protègent et sauvent des vies au péril des leurs".

L'affaire Théo est également devenue un véritable sujet de campagne électorale, obligeant certains candidats à prendre ouvertement position sur la question et à lever le voile sur leur programme sécuritaire. Marine Le Pen, candidate du Front national (FN), qui dit soutenir par "principe" la police dans cette affaire, a demandé l'interdiction des manifestations de soutien à Théo.

"Alors que ces manifestations ont systématiquement sombré dans la violence, la haine et les dégradations ces derniers jours, il est incompréhensible que le gouvernement n'ait pas pris les mesures qui s'imposent pour interdire ces rassemblements et garantir l'ordre républicain", a-t-elle déclaré samedi dernier dans un communiqué.

Le candidat de la droite, François Fillon, en campagne dans l'Essonne, a estimé qu'un "acte d'une pareille violence [commis sur Théo] ne doit pas retomber sur la police, la gendarmerie qui n'ont rien à voir là-dedans", et que les coupables doivent être "sanctionnés". M. Fillon précise toutefois que l'acte doit être d'abord prouvé, l'enquête étant en cours. M. Fillon a promis un grand ministère de la Sécurité nationale s'il est élu et d'injecter 12 milliards de plus pour la sécurité, notamment dans la police, la gendarmerie et la justice.

Jean-Luc Mélenchon, également candidat à la présidentielle, plaide pour une radiation immédiate des quatre policiers auteurs de violence sur Théo, plaidant pour la "formation professionnelle et une éthique irréprochable de ceux qui sont dépositaires de la loi". "Il faut purger dès maintenant les éléments malsains" de la police, a-t-il déclaré sur BFMTV.

Quant à Benoît Hamon, il estime qu'il y a urgence à rétablir la confiance entre la population et les policiers, représentants d'une République qui protège. Le candidat socialiste propose à cet effet le retour de la police de proximité pour "rétablir cette confiance".

Emmanuel Macron annonce aussi la création d'une "police de sécurité quotidienne", qui consiste à "déployer une police mieux ancrée dans les territoires dont elle a la charge". "Une police qui connaît la population est plus à même de résoudre les problèmes locaux", a expliqué le candidat du mouvement En marche sur son compte Facebook.

Théo, qui a quitté l'hôpital jeudi dernier, avait indiqué à la presse avoir été victime de viol avec une matraque et d'insultes racistes de la part des quatre policiers. "Les dégâts sont considérables : le côlon a été touché, c'est dire si cette matraque était longuement pénétrée. Il porte une poche. Psychologiquement, il est démoli", avait déclaré son avocat, Me Dupond-Moretti.

(Rédacteurs :Qian HE, Guangqi CUI)
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