Dernière mise à jour à 08h39 le 13/02
La Seine-Saint-Denis, au nord-est de Paris, est toujours sous tension samedi, plus d'une semaine après l'interpellation violente de Théo, un jeune homme d'Aulnay-sous-Bois, par quatre policiers lors d'un contrôle d'identité.
Une manifestation de soutien à Théo devant le tribunal de Bobigny samedi dans l'après midi s'est terminée par des heurts entre jeunes et forces de l'ordre, occasionnant des dégâts matériels dont des véhicules et des biens publics, comme la gare routière de Bobigny qui a été saccagée.
Plusieurs manifestations émaillées d'incidents ont déjà eu lieu à Aulnay-sous-Bois et dans les quartiers environnants depuis l'interpellation de Théo, victime de viol avec une matraque, de crachat et d'insultes racistes de la part des policiers.
Ils m'ont "mis contre le mur, et un des policiers m'assène un coup. Je l'ai vu avec sa matraque, il me l'a enfoncée volontairement dans les fesses et je suis tombé sur le ventre. Dans le véhicule ils m'ont donné des coups et traité de negro, de bamboula et de salope", a-t-il expliqué depuis son lit d'hôpital.
Une violence qui lui a valu 60 jours d'incapacité totale selon son avocat Me Dupond-Moretti. "Théo est très mal, comme quelqu'un qui s'est fait violer et les dégâts sont considérables. Le colon a été touché, c'est dire si cette matraque était longuement pénétrée", a déclaré l'avocat à la presse.
Cette interpellation musclée, filmée par des témoins et diffusée par certains médias, continue de faire réagir, malgré la mise en examen des quatre fonctionnaires de police pour "violences volontaires en réunion avec arme suivies d'incapacité supérieure à 8 jours", ainsi que pour "viol en ce qui concerne l'un d'entre eux, par personne dépositaire de l'autorité publique".
Avant la manifestation de Bobigny, des rassemblements ont eu lieu à Paris, Rennes et Nantes, pour réclamer justice. La classe politique également, à travers les candidats à la présidentielle réclame justice. "Mes pensées pour Théo et sa famille, il faut une enquête déterminée et transparente. Les policiers représentent la République qui protège. Il y a urgence à rétablir la confiance", a tweeté le candidat du PS, Benoît Hamon.
"Soutien à Théo et sa famille. Expulsion des tortureurs de la police républicaine", a posté sur son compte le candidat de la France insoumise, Jean-Luc Mélenchon. Pour François Fillon, candidat de la droite, un acte d'une violence pareille ne peut pas retomber sur les forces de sécurité. "Il y a partout des individus qui commettent des fautes, ils doivent être sanctionnés", a-t-il indiqué.
Alors que pour Marine Le Pen, candidate du Front national, le principe c'est de soutenir les forces de police, "sauf démonstration par la justice qu'ils ont commis un délit ou crime". Selon la presse, l'Inspection générale de la police nationale a retenu dans son rapport transmis à la juge en charge du dossier, la thèse de l'accident et non du viol.
Du côté des autorités, on multiplie des appels au calme depuis plus d'une semaine, craignant sans doute une nouvelle émeute des banlieues suite à celle de 2005, sous la présidence de Nicolas Sarkozy.
Le Premier ministre français, Bernard Cazeneuve, qui a plaidé pour "la plus grande fermeté" dans cette affaire, a exprimé mercredi à l'Assemblée nationale sa "solidarité et son respect profond" pour l'appel au calme que la victime a lancé aux manifestants de son lit d'hôpital.
"C'est des propos de responsabilité, de dignité et qui avaient une force républicaine qui doit forcer le respect de tous ceux qui sont attachés aux valeurs de la République", a dit M. Cazeneuve.
La secrétaire d'Etat chargée de l'Aide aux victimes, Juliette Méadel, a également qualifié l'appel au calme de Théo, de "propos admirables", et dit attendre que "la justice puisse faire son travail pour que la vérité surgisse". C'est dans cette même dynamique que le président François Hollande a rendu visite mardi dernier à la victime.