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Nicolas Lebourg : "la montée des populismes en Europe est un phénomène structurel"

Xinhua | 16.05.2017 08h36

"La montée des populismes en Europe est un phénomène structurel", a fait savoir Nicolas Lebourg, historien français spécialiste du Front National dans une récente interview accordée à Xinhua.

Selon lui, il y a une "droitisation" de l'espace transatlantique depuis le premier choc pétrolier en 1972 qui s'exprime par le passage d'un Etat social à un Etat pénal, sécuritaire, "avec un recul des valeurs de l'humanisme égalitaire au bénéfice d'une ethnicisation des représentations sociales".

"Cela est complété désormais par l'émergence des 'démocraties illibérales' en Europe de l'Est, où la démocratie sert à réduire les libertés publiques. Le phénomène est particulier en France, entre autres à cause de la profonde crise culturelle qu'engendre la globalisation dans un pays qui a le culte de l'Etat et de la Nation unitaires. Ce populisme demeure d'abord à droite et dans l'extrême droite. La France Insoumise s'inspire du 'populisme de gauche' théorisé entre autres par le numéro deux du parti espagnol Podemos", a souligné Nicolas Lebourg, précisant que le parti de Jean-Luc Mélenchon n'est pas un mouvement d'extrême gauche car "il ne prône ni socialisation des moyens de production ni sortie de la démocratie représentative".

"Le score de La France Insoumise a été exceptionnel, mais en profitant de la décomposition du Parti Socialiste qu'a provoqué le gouvernement de Manuel Valls", a-t-il ajouté.

Interrogé sur les stratégies des différents partis populistes d'Europe, l'historien français a expliqué qu'elles étaient d'abord imposées "par les règles institutionnelles, très diverses en Europe".

"La France est un pays centralisé où tout est conditionné par une élection présidentielle à deux tours. La Belgique est un pays fédéral multilinguistique. L'Italie a un système parlementaire avec une représentation à la proportionnelle. Bref, la diversité inhérente à l'Europe amène des situations diverses, mais quasiment tous les mouvements ont en revanche pris une inclinaison commune : la dénonciation de l'islam" a-t-il indiqué.

Concernant leur évolution, le seul cas important de mouvement fasciste est en Grèce avec Aube dorée selon Nicolas Lebourg, tandis que les autres extrêmes droites européennes prônent une gouvernance d'extrême droite, "mais au sein des institutions légales". "Cependant, même sans être au pouvoir, ces mouvements influencent le réel. La dégradation des valeurs humanistes est-elle que de nombreux gouvernements, dont le français, tremble à l'idée d'accueillir quelques réfugiés alors que c'est par milliers qu'ils se noient dans la méditerranée" a-t-il expliqué.

L'historien français distingue trois vagues de populisme en Europe. Le populisme identitaire, issu des populismes les plus anciens, héritant d'une matrice radicale (Autriche, Flandres). Les deuxièmes, avec une matrice anti-fiscaliste (Danemark, Norvège) ont évolué vers un identitarisme de la prospérité, allant jusqu' à susciter des antagonismes inter-européens au Luxembourg et en Suisse par exemple. Enfin, les derniers populismes apparus ont une matrice agrarienne (Finlande, Suisse) qui a évolué vers un libéralisme hédoniste sécuritaire. Le Front National français à la particularité "d'avoir réussi à combiner toutes ces données, ce qui explique sans doute en bonne part la particularité de son succès", a indiqué Nicolas Lebourg.

(Rédacteurs :Qian HE, Wei SHAN)
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