Dernière mise à jour à 09h19 le 10/02
Depuis des siècles, les scientifiques et chercheurs s'intéressent aux animaux volants -les oiseaux, les chauves-souris et les insectes- pour y puiser l'inspiration pour leurs découvertes et créations, et, plus récemment, quand ils dessinent des drones volants. Mais à présent, ils étudient également comment utiliser la technologie pour interagir avec les animaux et même les guider en vol, améliorant ainsi les adaptations uniques qui leur permettent de prendre l'air. À cette fin, des ingénieurs américains ont équipé des libellules de minuscules contrôleurs montés sur le dos de ces insectes graciles, qui émettent des commandes directement vers les neurones qui contrôlent le vol de ces animaux.
Ce projet, connu sous le nom « DragonflEye », utilise l'optogénétique, une technique qui emploie la lumière pour transmettre des signaux aux neurones. Et les chercheurs ont génétiquement modifié des neurones de libellules pour les rendre plus sensibles à la lumière, et donc plus faciles à contrôler par le biais d'impulsions de lumière mesurée. Une étude de 2007 publiée dans le journal Physical Review Letters a montré que les libellules ont une grande tête, un corps long et deux paires d'ailes qui ne battent pas toujours en synchronisation. Les auteurs de l'étude ont constaté que les libellules maximisent leur portance lorsqu'elles rabattent les deux ensembles d'ailes ensemble, et qu'elles planent en battant leurs paires d'ailes de façon non synchronisée, mais à la même vitesse.
Selon un communiqué publié par l'American Physical Society en novembre 2014, les chercheurs ont utilisé des séquences vidéo à haute vitesse pour suivre le vol de la libellule et construire des modèles informatiques pour mieux comprendre les « manœuvres complexes » de ces insectes, présentant leurs conclusions lors de la 67e réunion annuelle de la dynamique des fluides. Jesse Wheeler, ingénieur biomédical au Laboratoire Charles Stark Draper (CSDL) dans le Massachusetts et chercheur principal sur le programme DragonflEye, voit dans ces petits maîtres du vol de potentiels « engins volants » sous contrôle qui seraient « plus petits, plus légers et plus furtifs que tout ce qui est fait par l'homme ».
Le projet est une collaboration entre le CSDL, qui a développé le « sac à dos » qui contrôle la libellule, et l'Institut médical Howard Hughes (HHMI), où les experts ont assuré l'identification et l'amélioration de la « direction » des neurones situés dans le système nerveux de la libellule, le rendant plus réactif à la lumière. « Ce système repousse les limites de la collecte d'énergie, de la détection de mouvement, des algorithmes, de la miniaturisation et de l'optogénétique, le tout dans un système suffisamment petit pour qu'un insecte puisse le porter », a souligné Charles Wheeler.
Au delà de l'aspect un peu « science-fiction » de ce projet, en plus de contrôler le vol d'insectes, les petits optrodes flexibles greffés sur les libellules pourraient aussi avoir des applications en médecine humaine, a-t-il ajouté. « Un jour, ces mêmes outils pourraient faire progresser les traitements médicaux chez les humains, ce qui entraînerait des traitements plus efficaces avec moins d'effets secondaires », a précisé Charles Wheeler. « Notre technologie optrode souple fournit une nouvelle solution pour permettre des diagnostics miniaturisés, accéder en toute sécurité à des cibles neuronales plus petites et offrir des thérapies de plus haute précision ».