A la veille d'une réunion de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC) prévue avec les responsables de la rébellion centrafricaine Séléka dimanche à Libreville au Gabon, Eric Massi, porte-parole et coordonnateur international de cette opposition armée à Paris en France, a accusé samedi le pouvoir de Bangui de se réarmer.
"François Bozizé prépare la guerre. Nous considérons qu'il ne respecte pas la ligne rouge imposée par la CEEAC, à partir du moment où il utilise le temps de la négociation pour se réarmer. Il est en train de déployer des positions offensives. Donc, il y a une option de reprise des hostilités", a déclaré Massi joint par Xinhua dans la capitale française où il s'est installé.
Après les déclarations en début de semaine du colonel Michel Narkoyo, un des responsables militaires de la coalition rebelle qui a lancé son offensive le 10 décembre pour renverser le pouvoir du président François Bozizé, Eric Massi a accusé Bangui d' avoir fait recours à des mercenaires sud-africains pour cette logique présumée de guerre.
"Hier, les mercenaires sud-africains qui sont arrivés à Bangui à cette semaine sont montés pour partir sur la ville de Damara (ville déclarée ligne rouge par la CEEAC qui a décidé d'y déployer une force de dissuasion et d'interposition de 760 hommes afin de préserver la République centrafricaine du chaos, NDLR)", a-t-il affirmé par ailleurs.
Sur le nombre des mercenaires déclarés, aucune indication précise n'est fournie. "Les chiffres sont variables. On parle de plusieurs dizaines à une centaine", se contente-t-il de dire.
Mais, Eric Massi soutient aussi que c'est avec des armes et d'autres matériels militaires en provenance d' Afrique du Sud que François Bozizé rééquipe les Forces armées centrafricaines (FACA, armée régulière). "On parle d'hélicoptères en construction à l'aéroport de Bangui (qui abrite également une base militaire française, NDLR)".
A Bangui, les autorités rejettent formellement les accusations de présence de mercenaires aux côtés des forces loyalistes.
"A aucun instant, s'est-il défendu, un appel n'a été lancé à des mercenaires de n'importe quel pays. C'est une guerre médiatique qu' ils (les rebelles, NDLR) mènent en complément de l'aspect militaire. Ce que je peux vous dire en tout cas, c'est qu'il n'y a pas de mercenaires, de forces non conventionnelles aux côtés de l'armée. Le gouvernement ne peut pas se permettre ce genre de faute", s'est défendu mercredi à Xinhua le ministre de la Communication, Alfred Poloko.
"Les forces qui sont là, avait ajouté celui-ci, proviennent soit de la CEEAC, soit des pays avec lesquels la RCA a des accords militaires", à l'exemple de la France qui dispose notamment d'une base militaire à l'aéroport de Bangui M'poko qui a été renforcée afin de protéger, non pas le régime Bozizé, mais les Français vivant en RCA, selon les déclarations officielles des autorités de Paris.
Un responsable du ministère sud-africain, sans se prononcer sur les allégations de présence militaire en Centrafrique, a toutefois menacé dans une déclaration à la presse les rebelles Séléka de représailles en cas de poursuite de leurs hostilités contre le pouvoir de Bangui.
Eric Massi a invité le dirigeant centrafricain, au pouvoir depuis 2003 suite à un coup d'Etat contre Ange-Félix Patassé, élu démocratiquement quatre ans auparavant et décédé en 2011, de "faire preuve de retenue s'il veut des négociations de paix".
Dans un appel renouvelé au dialogue et à la paix porté vers "une solution qui permet de ramener une paix durable dans le pays et de relancer les activités normales", il a mise en garde "tous ceux qui, de par leur initiative, tenteraient de provoquer la dégradation du climat sécuritaire dans Bangui et dans le pays, et particulièrement les éléments non réguliers, mercenaires et milices d'autodéfense du président François Bozizé".
A ces soutiens présumés du pouvoir central, il a demandé de "se présenter aux forces africaines de paix que sont la FOMAC (Force multinationale de l'Afrique centrale, NDLR) et la MICOPAX (Mission de consolidation de la paix de la CEEAC en RCA, NDLR) afin d'être cantonnés et désarmés".
Des sources des droits de l'homme dans la capitale du pays s'inquiètent, sans pour autant les assimiler à des milices, la mise en place de barrières dites de sécurité par des bandes de jeunes.
"Pour l'instant, nous ne pouvons pas dire que c'est des milices. C'est des jeunes qui tiennent des barrières. Hier, on fait une déclaration pour que cette situation cesse. Cette déclaration sera publiée aujourd'hui", a indiqué à Xinhua Fulgence Zeneth, de l'Observatoire centrafricain des droits de l'homme (OCDH).
Le porte-parole et coordonnateur international de la rébellion a souhaité que "la sécurité de la population de la capitale soit assurée". "Nous avons demandé, a-t-il ajouté, la libération des personnes qui avaient été arrêtées et que la lumière soit faite au sujet des personnes disparues".
Il a évalué à 413 le nombre de personnes retenues à la section des recherches et des investigations (services spéciaux centrafricains) et à 111 à 117 d'autres détenues au camp Roux à Bangui.
Une délégation conduite par son leader, Michel Am Nondokro Djotodia, ex-fonctionnaire du ministère centrafricain des Affaires étrangères et ex-consul à Nyala au Soudan, doit participer à une réunion avec les responsables de la CEEAC dimanche à Libreville au Gabon en vue de l'élaboration d'un calendrier des négociations de paix prévues sous l'égide de l'organisation régionale.
Par Raphaël MVOGO