Visé par une pétition de la Coalition citoyenne d'opposition aux rébellions armées (COCORA, proche du pouvoir) le menaçant de le faire traduire en justice pour « atteinte à la souveraineté de la RCA », Eric Massi, porte-parole et coordonnateur international de la rébellion Séléka, a dénoncé samedi une « campagne de haine et de division » du pouvoir de Bangui.
« On a essayé de faire croire qu'on était divisés, qu'on était tous des étrangers et que moi-même j'étais étranger. Ce qui est faux », a répondu Massi, joint à Paris en France où il est installé. D'après lui, « si vous avec Bozizé, vous êtes Centrafricain. Si vous ne l'êtes pas, vous êtes étranger ».
Accusé à son tour de recours à des mercenaires, notamment sud- africains, le pouvoir centrafricain désigne la coalition rebelle qui menace de le renverser comme une organisation de « mercenaires », de « hors-la-loi » et d'« ennemis du peuple centrafricain » composée de « beaucoup d'étrangers », des personnes ne parlent par « le sango, la langue nationale parlée par tous les Centrafricains ».
Dans son offensive lancée le 10 décembre, Séléka a enregistré une progression remarquable vers Bangui en prenant au passage le contrôle de plusieurs villes dont la dernière Sibut, distante d'environ 170 km de la capitale.
Une force d'interposition de la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale (CEEAC), organisation régionale à laquelle la République centrafricaine (RCA) appartient et qui tente de trouver une solution à la crise, a été déployée à Damara, décrétée « ligne rouge », pour stopper la avancée des rebelles et, officiellement, préserver le pays du chaos dans l'éventualité de la bataille de Bangui.
Créée dans la foulée de ce conflit, la COCORA a annoncé jeudi l'ouverture d'une pétition visant à faire traduire Eric Massi devant les tribunaux nationaux et internationaux pour « atteinte à la souveraineté de la RCA, atteinte à l'intégrité physique du peuple centrafricain et usurpation de nationalité ».
Le porte-parole international désigné de Séléka est accusé de n'être pas un fils légitime de Charles Massi, fondateur de l'Union des forces démocratiques pour le rassemblement (UFDR, groupe armé membre de la coalition) mort en détention en 2009. Le colonel Michel Narkoyo, un des responsables militaires de la rébellion, avait déjà ironisé au sujet de ces allégations, les qualifiant d'absurdes.
« Je me consacre à sauver des vies en Centrafrique », a assuré Eric Massi, disant faire fi de la « grande campagne médiatique du pouvoir à l'égard de Séléka, une campagne qui a d'abord visé à déstabiliser » la rébellion.
Face à des usurpateurs de titres montés selon lui par les autorités de Bangui, il s'est défendu d'être l'unique relais et vitrine sur la scène internationale de la coalition. « Il y a un seul porte-parole et coordonnateur international de la Séléka. C'est moi ».
A l'en croire, la désignation des principaux dirigeants de la rébellion date du débat de l'offensive en décembre. « Au moment où les opérations ont commencé, nous nous sommes concertés. Les gens ont jugé qu'il était très utile de parler d'une seule voie ».
Avec Michel Am Nondokro Djotodia, ex-fonctionnaire du ministère centrafricain des Affaires étrangères à Bangui et ancien consul à Nyala au Soudan, dans le rôle de président de Séléka, un leader qui « incarne l'unité » de l'avis d'Eric Massi, le général Aubain Issa Issiaka a été désigné chef d'état-major des troupes rebelles.
Sous la pression de la CEEAC qui peine à mettre d'accord les deux parties en conflit sur un calendrier des négociations, une délégation de la rébellion conduite par son coordonnateur général est attendue pour une réunion à Libreville au Gabon, en vue notamment des préparatifs du dialogue avec le pouvoir du président Bozizé.
Après ce rendez-vous, suivre mardi une rencontre des ministres des Affaires étrangères de l'organisation régionale.
« La Séléka, les partis politiques et le peuple centrafricain veulent qu'un seul point soit discuté : c'est le départ de François Bozizé », a insisté Eric Massi réaffirmant la principale condition de son camp pour « une solution qui permet de ramener une paix durable dans le pays et de relancer les activités normales ».
Il a accusé François Bozizé de se réarmer en vue de la reprise des hostilités, avec le soutien de mercenaires sud-africains. Des accusations rejetées par celui-ci, qui s'est dit malgré tout disposé à former un gouvernement d'union nationale au terme des négociations de Libreville qui s'annoncent laborieuses, au regard des exigences de la rébellion.