Rendu public aux Tunisiens le 22 avril 2013, le projet de la nouvelle Constitution tunisienne est classé par le président de la Constituante parmi les "meilleurs textes du genre au monde" à moins que des experts, politiciens et spécialistes en droit constitutionnel tunisiens le considèrent comme un texte "obscur" et contradictoire.
Parmi les points de litige présenté par des experts tunisiens, réunis récemment lors d'une conférence-débat à Tunis, les jugements émanant du projet de la Constitution qui servent des considérations partisanes autant que l' intérêt suprême de l' Etat tunisien.
En premier lieu, de fortes critiques ont ciblé la limitation de l' âge d' éligibilité à la présidence de la République à un maximum de 75 ans. "Sur 135 Constitutions en vigueur dans le monde, seuls 8 d' entre-elles limitent l' âge du candidat à la présidence (...) et ce sont les Constitutions de 7 Etats d' Afrique sub-saharienne en plus de celle de Tadjikistan", a rapporté le quotidien tunisien "Le Temps" citant Rafaa Ben Achour, Farhat Horchani et Mme Mouna Karim Dridi (professeurs de droit) et Lazhar Karoui Chebbi (bâtonnier).
En plus du retard observé dans la rédaction de la nouvelle Constitution tunisienne (plus d' un an) provoquant le mécontentement de la classe politique et des hommes de droit, "ce projet se contente des généralités et laisse aux lois le soin de réglementer les détails, et de cette façon, il laisse ces détails à la discrétion du législateur comme la durée de la garde à vue ou de la détention préventive", a averti Rafaa Ben Achour.
Selon ce dernier, les renvois aux lois dans le projet de Constitution "sont spécialement graves en l' absence d' une cour constitutionnelle chargée de juger de la constitutionnalité des lois" d' autant plus que ce texte "est long et comporte plus de 139 articles", a encore signalé M. Ben Achour.
Pour ne citer qu' un seul exemple, l' article 15 du projet de la nouvelle Constitution stipule qu' outre l' armée et les forces de sécurité intérieure, seul l' Etat tunisien peut en vertu de la loi créer d' autres formations militaires ou paramilitaires d' intérêt public. Dans ce sens, "il est difficile de préciser le domaine d' application de l' intérêt public", toujours selon M. Ben Achour.
La nouvelle Constitution, comme finalement présentée au peuple, société civile et aux experts tunisiens, tend vers un régime parlementaire plutôt qu' un régime présidentiel bien que le chef d' Etat est élu au suffrage universel. Des commentateurs ont averti dans ce sens que les attributs du président de la République sont assez limités comparativement à ceux du Chef du gouvernement qui se veut au centre du pouvoir exécutif.
Le préambule du projet de la nouvelle Constitution tunisienne n' a pas échappé au champ de critiques des analystes et experts en droit qui ont détecté l' absence de référence à l' engagement de la Tunisie à respecter les chartes et les lois internationales.
Le professeur de droit Farhat Horchani a pointé de doigt une certaine contradiction entre le souci de l' attachement à l' universel et celui de l' attachement aux spécificités tunisiennes.
Bien qu' il a comporté plusieurs articles faisant l' objet d' un consensus entre la majorité des députés, de la classe politique et des experts, le projet de la nouvelle Constitution tunisienne semble percuter une impasse avant même d' être examiné à la plénière. Parmi les critiques jugées par la presse locale de "radicales" figurent la prédominance de l' Islam sur le texte de la Constitution, les conditions de candidature aux présidentielles dont le statut de musulman et un plafond de 75 ans en plus de la contradiction entre les dispositions exhortant la civilité de l' Etat d' une part et celles imposant l' Islam comme religion de l' Etat tunisien d' autre part.