La Chine a réellement besoin d’un second porte-avions

Photo d’archives non datée montrant le premier porte-avions chinois, le Liaoning.

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Le Ministère chinois de la défense a récemment confirmé la construction d’un deuxième porte-avions. Zhang Junshe, chercheur à l'Institut de recherches en études militaires navales de l’APL, a partagé ses idées sur ce nouveau développement :

Q : Quelles sont les principales différences entre le second porte-avions chinois et le premier ?

A : La coque du Liaoning, le premier porte-avions chinois, été achetée à l'Ukraine, bien que son moteur, son système d’armes et d’alimentation en électricité aient tous été fabriqués en Chine.

Le second sera entièrement « conçu et fabriqué en Chine » et il constituera un jalon dans l'histoire de la marine chinoise. Les essais et le fonctionnement du Liaoning ont fourni de précieuses expériences, qui aideront les concepteurs et les ingénieurs à éviter certains problèmes courants dans la construction d'un porte-avions.

Q : Quelle sera la taille du nouveau porte-avions ? Et pourquoi utiliser une propulsion conventionnelle plutôt qu’une propulsion nucléaire ?

A : Il sera de taille moyenne. Les porte-avions peuvent être divisés en quatre catégories selon leur tonnage. Le futur porte-avions chinois déplacera environ 50 000 tonnes d'eau sans chargement et, éventuellement 60 000 tonnes à pleine charge, ce qui en fera un porte-avions de taille moyenne.

Construire un porte-avions à propulsion nucléaire implique de nombreuses préoccupations, notamment en matière de sécurité, de prévention des fuites nucléaires et de remplacement du réacteur nucléaire après 15 ans. La Chine possède les technologies permettant d’utiliser l'énergie nucléaire dans les sous-marins, mais il faut davantage de recherches pour le faire dans un porte-avions.

Q : Un second porte-avions est-il nécessaire pour la Chine ? De combien en a-t-elle besoin ?

A : Oui, il est nécessaire, parce qu’un seul porte-avions ne suffit pas à répondre aux besoins de défense d'un grand pays comme la Chine. Les porte-avions doivent subir des contrôles et des essais réguliers, et parfois même les réparations. Par conséquent, un pays comme la Chine a, théoriquement, besoin d'au moins trois porte-avions pour garantir qu’il y en a toujours au moins un en service. Par exemple, l'Inde voisine possède trois navires de ce type.

En tant que pays avec 1,3 milliard d’habitants, plus de 18 000 kilomètres de côtes, environ 3 millions de kilomètres carrés de territoire maritime et des intérêts croissants à l'étranger, la Chine a sans aucun doute besoin de trois porte-avions. Ceux qui montent en épingle la théorie de la « menace chinoise » doivent regarder en face la réalité de la Chine.

Q : Quelles sont les conditions technologiques nécessaires pour la construction d'un porte-avions ?

A : Il faut plus que de l'argent pour construire un porte-avions. Sans industries matures du transport maritime, de l'aviation, des armes, de l'électronique et des communications, un pays ne peut pas construire de porte-avions. Si un pays veut construire un porte-avions à propulsion nucléaire, il doit également posséder de bonnes capacités industrielles nucléaires. Et comme un porte-avions transporte des centaines de militaires et couvre de longues distances, un pays qui possède ce genre de navires a également besoin d'une industrie de la logistique stratégique puissante.

Q : Combien de temps faut-il pour construire un porte-avions ?

A : Cela varie suivant les pays. Construisant des porte-avions depuis des décennies, les Etats-Unis possèdent des technologies de pointe et une riche expérience en termes de coordination, ce qui fait qu'il leur faut environ trois ans pour construire un porte-avions, deux ans pour y installer le système d’armes et autres dispositifs, et environ une année de plus pour que son personnel s'y habitue. Ainsi, il faut environ 6 ans à un porte-avions américain pour devenir une unité véritablement en état de combattre.

Pour la Chine, il n'y a pas encore de calendrier, parce que nous en sommes encore à accumuler de l'expérience dans le processus de construction. Mais nous sommes sûrs que la Chine a fait des progrès et dans l'avenir, il faudra moins de temps pour construire un porte-avions.

Q : En quoi le rôle du nouveau porte-avions sera-t-il différent de celui du Liaoning ?

A : Le Liaoning est davantage un navire de formation, utilisé pour la formation du personnel, l'expérimentation de nouveaux modèles d'avions, et pour tester la fiabilité et la compatibilité des différents systèmes. Le nouveau porte-avions devrait être une unité véritablement destinée au combat.

Q : Maintenant qu’elle construit un second porte-avions, quelle est la distance pour que la Chine devienne une véritable puissance navale ?

A : Pour parler franchement, il y a encore un grand écart entre la Chine et les autres grandes puissances navales mondiales comme les Etats-Unis. Les Etats-Unis possèdent 10 porte-avions et le Royaume-Uni en aura deux nouveaux dans quelques années. Ainsi, même après l’entrée en service de son deuxième porte-avions, la Chine sera encore loin d'être une puissance navale mondiale.

En outre, tant le Liaoning que le navire en cours de construction sont des porte-avions de taille moyenne avec une propulsion conventionnelle et non nucléaire. Donc, il est encore trop tôt pour pouvoir dire quand la Chine deviendra une puissance navale mondiale.