Dernière mise à jour à 10h38 le 07/08
L'art des grottes de Mogao a été présenté avec la technologie 3D lors du Forum de Davos d'été à Dalian, dans la Province du Liaoning, en 2015. (Photo / Xinhua) |
La popularité des grottes de Mogao, qui abritent la plus grande collection d'art bouddhiste au monde, constitue également pour elle la plus grande des menaces.
Ces grottes, situées dans la Province du Gansu, au Nord-ouest de la Chine, ont déjà reçu cet été beaucoup plus de visiteurs qu'elles ne peuvent en accueillir, ce qui modifie leur environnement. Mais les nouvelles technologies pourraient aider à sauver les cavernes victimes de leur propre succès.
Selon les responsables de l'Académie de recherche de Dunhuang, responsable des grottes qui ont survécu et traversé les siècles, en juillet, 350 000 personnes ont visité le site. C’est deux fois le plafond mensuel et 20% de plus qu'en juillet 2016. Ainsi, d’après Li Ping, responsable de la réception des visiteurs, le nombre maximal de touristes en une seule journée en juillet a dépassé 18 000, soit trois fois son maximum quotidien.
« L'humidité et la température à l'intérieur des grottes augmentent quand il y a trop de touristes », a souligné M. Li, ajoutant que l'humidité et le dioxyde de carbone qu'ils exhalent causent des dommages irréparables aux fresques des grottes et aux sculptures peintes. Le sable et le vent constituent également une menace. Les archéologues disent d’ailleurs que les grottes se détériorent plus rapidement que par le passé.
Pour réduire les dégâts, 6 000 visiteurs au maximum sont autorisés dans les grottes chaque jour. Les touristes peuvent réserver des visites par mois à l'avance sur Internet, mais cet été, les réservations ont été rapidement épuisées et 12 000 billets supplémentaires sont vendus tous les deux jours sur le site pour accueillir les visiteurs qui n'ont pas réservé en ligne.
Les grottes, situées à 25 kilomètres au Sud-est du centre-ville de Dunhuang, ont vu un nombre croissant de visiteurs depuis leur ouverture au public à la fin des années 1970, et plus encore après leur inscription au Patrimoine mondial de l'UNESCO en 1987.
Chen Haitao, membre de l'équipe de design de l'Académie de Dunhuang, au travail dans la caverne 254 des grottes de Mogao, à Dunhuang, dans la Province du Gansu (Nord-ouest de la Chine), en 2016. (Photo / Xinhua)
Le dilemme entre la préservation du site vieux de 1 651 ans et les exigences du tourisme est devenu plus pressant, et l'Académie a donc adopté une série de mesures pour essayer de trouver un équilibre, outre limiter les visites quotidiennes.
Selon Zhang Xiantang, directeur adjoint de l'Académie, la numérisation des peintures murales se trouvant à l'intérieur des grottes de Dunhuang est le moyen le plus efficace de les protéger. Avant que les visiteurs commencent leur visite des vraies grottes, ils sont d'abord dirigés vers le centre visiteurs, où des films en 3D utilisant la technologie numérique montrent les fresques et les sculptures dans certaines grottes fermées au public pour des raisons de préservation.
Cette technique a permis aux visiteurs d’avoir une meilleure connaissance des lieux et de réduire leur séjour dans les grottes réelles. L'Académie permet à chaque visiteur de se rendre dans huit cavernes par jour et limite le temps combiné dans celles-ci à 75 minutes.
Chaque grotte comporte des centaines de personnages sur ses murs, principalement Bouddha, et certaines de ces œuvres d'art ne dépassent pas la taille de la paume d’une main. Les visiteurs ne peuvent pas avoir une bonne vision des détails des fresques, car ils ne restent dans une grotte, et dans une lumière faible, que pour quelques minutes seulement.
Mais avec des impressions haute définition affichées dans les musées, les gens peuvent voir les détails clairement, a souligné M. Zhang. Le projet a permis à ce « musée mural inamovible » d’être montré partout dans le monde avec la technologie 3D, a-t-il dit.
Il y a 2 415 sculptures peintes et 45 000 mètres carrés de fresques dans les 735 grottes que compte le site, les plus anciennes datant de 366.
Selon Yu Tianxiu, qui travaille depuis des années sur la numérisation des grottes, à ce jour, l'Académie a recueilli les données de 119 cavernes, dont 30 peuvent être consultées en ligne, sur le site http://e-dunhuang.com/. Le site Internet, lancé le 1er mai 2016, aura une version mise à jour d'ici la fin de cette année, offrant plus de photos et d'expériences interactives.
« Il faut un mois pour photographier une peinture et traiter l'information en ligne », a précisé M. Yu.
La numérisation de Dunhuang a commencé dans les années 1990 après qu'il soit apparu que les fresques nécessitaient une protection contre la chaleur, l'humidité et le dioxyde de carbone.
« L'odeur des parfums peut s'attarder dans une grotte pendant des jours et nuire aux fresques », a de son côté déclaré Bian Lei, guide touristique dans les grottes. « Les couleurs se fanent aussi. Je peux le voir ».
Il sera difficile d’achever la numérisation de toutes les grottes. Une photo d'une peinture sur un mur nécessite actuellement 60 gigas d'espace de stockage, à peu près celui d'un smartphone, car une photo comporte souvent plusieurs milliers de parties.
En juillet, Seagate Technology, une société américaine de stockage de données, a fourni une aide à l'Académie et a donné 78 000 Dollars pour soutenir la numérisation de la grotte 307, qui possède un grand nombre d'images d'enfants.
« Beaucoup de sociétés de haute technologie veulent coopérer avec nous. Mais nombre d'entre elles abandonnent parce qu'elles sous-estiment le temps et la patience nécessaires à la préservation », a dit Yu Tianxiu. « C'est une carrière à vie ».
En plus de prendre des photos et de les traiter pendant des mois, M. Yu et son équipe utilisent également les données pour reproduire l'apparence des sculptures et des peintures murales grâce à la technologie d'impression 3D. Les visiteurs des grottes peuvent ainsi voir les répliques de huit grottes devant les vraies grottes. Elles font également partie du projet de numérisation de l'Académie et ont été exposées dans de nombreuses villes de Chine, ainsi qu'aux États-Unis, au Japon, en Australie et en Russie.