Dernière mise à jour à 09h53 le 13/12
L'Arabie saoudite a annoncé le 11 décembre qu'elle autoriserait à nouveau l'ouverture de salles de cinéma pour la première fois en plus de trois décennies, dans le cadre d'une vaste campagne de modernisation menée par le prince héritier, à l'image désormais bien établie de réformateur dans ce royaume conservateur. La nouvelle a été saluée, notamment par l'industrie américaine du cinéma, mais a également soulevé des questions sur les types de restrictions et de censure qui pourraient malgré tout être encore imposées.
Il est prévu de construire des centaines de salles de cinéma, y compris des lieux haut de gamme comme on peut les voir dans des villes comme Los Angeles, New York et Londres. Cette initiative fait partie de la « Vision 2030 » du Prince héritier Mohammed bin Salman, une stratégie visant à ouvrir l'économie du royaume wahhabite, à réduire sa dépendance au pétrole et à atténuer les restrictions sociales imposées à sa population, majoritairement jeune. Les autorités ont également récemment annoncé des mesures pour permettre aux femmes de conduire l'année prochaine, autoriser des concerts et maîtriser la redoutée police religieuse, la force chargée d'assurer la moralité et l'adhésion à la loi islamique.
« L'ouverture des cinémas agira comme un catalyseur pour la croissance économique et la diversification », a déclaré dans le communiqué le Ministre saoudien de la culture, Awwad bin Saleh Alawwad. « En développant un secteur culturel plus large, nous allons créer de nouvelles possibilités d'emploi et de formation, ainsi qu'enrichir les options de divertissement du royaume ». Les cinémas de luxe visent à exploiter la grande concentration de richesses et la forte consommation des pays riches en pétrole, ainsi que les jeunes citoyens habitués à regarder des films sur leurs ordinateurs et leurs téléphones.
« Je pense qu'il y a certainement une demande pour des salles de cinéma », a déclaré Eric Handler, un analyste des médias et du divertissement chez MKM Partners. « La question est de savoir quelle quantité de contenus hollywoodiens ou de tout autre pays du monde pourra entrer ». De fait, le gouvernement saoudien a d'ores et déjà précisé que les films présentés dans ses cinémas seraient censurés afin de s'assurer qu'ils sont conformes aux valeurs morales du royaume et aux lois islamiques. Bien que le prince, âgé de 32 ans, ait encouragé une manifestation plus modérée de l'islam que celle qui est favorisée par les très rigoureuses autorités religieuses locales, la société saoudienne reste profondément conservatrice. Le sexe et la nudité seront ainsi certainement interdits, et il pourrait même y avoir des salles séparant les femmes et les familles du public masculin.
Les cinémas ont été interdits en Arabie Saoudite depuis le début des années 1980, quand le royaume a commencé à imposer une version ultraconservatrice de l'Islam qui décourage le divertissement public et le mélange entre hommes et femmes. Cela n'a pas empêché les Saoudiens de regarder des films en ligne ou à la télévision par satellite. Beaucoup se rendent aussi dans les pays voisins comme le Bahreïn et les Émirats Arabes Unis pour avoir leur content de divertissement.