Dernière mise à jour à 09h11 le 05/12
La Chine a toujours attaché une grande importance à la coopération avec l'Europe et, ces dernières années, l'Union européenne s'est de son côté de plus en plus intéressée à la Chine. L'année prochaine, trois sommets Chine-Union européenne auront lieu : la réunion des dirigeants Chine-Europe centrale et orientale (17 + 1), la 22e réunion des dirigeants Chine-Union européenne et l'invitation envoyée par Angela Merkel au président Xi Jinping à venir en Allemagne en septembre (l'Allemagne occupera la présidence tournante de l'Union au second semestre de l'année prochaine) pour participer au Sommet extraordinaire Chine-Union européenne (27 + 1) à Leipzig. Les relations Chine-Union européenne entrent dans une nouvelle ère.
Des changements significatifs dans la perception de la Chine par l'Union européenne
Sous l'influence d'une série de facteurs nationaux et internationaux, la perception de la Chine par l'Union européenne a subi quatre changements importants :
Premièrement, la Chine n'est plus considérée comme un pays en développement mais plutôt comme une superpuissance. Les relations complémentaires deviennent de plus en plus compétitives. L'accent est mis sur la « réciprocité ». L'Union européenne pense que la Chine devrait ouvrir son marché à l'Europe et estime que la Chine devrait mettre en œuvre des réductions d'émissions de gaz à effet de serre.
Deuxièmement, la Chine n'est plus considérée uniquement comme une force économique et politique, mais comme un pays qui se concentre de plus en plus sur les forces technologiques et institutionnelles. L'Union européenne critique ses politiques industrielles, ses subventions aux entreprises, ses marchés publics, ses transferts de technologies et ses fusions et acquisitions.
Troisièmement, l'Union européenne cesse de mettre l'accent sur la coopération et se concentre sur la concurrence. La Commission européenne a publié ce printemps un document de stratégie intitulé « Plan d'action en 10 points » décrivant la Chine comme un partenaire (de coopération et de négociation), mais aussi comme un concurrent économique et un « rival systémique ».
Quatrièmement, l'Union européenne n'est plus sous le contrôle des États-Unis et insiste de plus en plus sur l'indépendance ; d'une part, elle ne suivra pas la politique chinoise des Etats-Unis et elle mettra davantage l'accent sur une politique de contact avec la Chine. Mais, dans le même temps, sa mentalité et ses mesures de défense face à la Chine se renforcent, et il devient ainsi plus difficile pour les entreprises chinoises d'acquérir des sociétés européennes dans des secteurs tels que l'intelligence artificielle, la robotique, les semi-conducteurs, la biotechnologie et la technologie quantique, et elle renforce les mesures de sécurité dans la participation de Huawei à la construction de la 5G en Europe.
En résumé, l'Union européenne a réalisé une évaluation réaliste de la Chine et s'adapte au fait que la balance des opportunités et des défis a changé. Pour autant, même si les relations entre l'Europe et les États-Unis sont conflictuelles, cela ne signifie pas pour autant que l'Europe augmentera ses emprunts auprès de la Chine (emprunter aux autres à son seul et entier profit), et l'Union européenne préconise une position ferme face à la Chine.
En outre, le sentiment d'antimondialisation a également affecté la mentalité de l'Union européenne à l'égard de la Chine. Les dernières données de l'OCDE montrent que le ralentissement du commerce mondial a le plus durement touché l'Union européenne. Les États-Unis et l'Europe s'affrontent sur le marché chinois et les économies chinoise et européenne sont étroitement liées par la mondialisation. La conclusion d'un accord commercial entre la Chine et les États-Unis pourrait restreindre le marché des entreprises européennes en Chine. L'Union européenne souhaite imposer diverses exigences à la Chine et espère obtenir d'elle des engagements en matière d'accès au marché et autres, et s'efforce d'améliorer l'environnement des entreprises européennes en Chine. Elle espère aussi que le contenu de l'accord entre la Chine et les États-Unis s'appliquera également à l'Europe. C'est également le contexte qui préside à l'espoir de l'Union européenne de parvenir à un accord d'investissement bilatéral avec la Chine l'année prochaine.
L'orientation des relations futures entre la Chine et l'Union européenne
Conformément à la mentalité européenne actuelle vis-à-vis de la Chine et aux priorités politiques d'Ursula von der Leyen après son entrée en fonction, l'intensification de la coopération et la gestion de la concurrence deviendront à l'avenir la priorité des relations entre la Chine et l'Union européenne.
Le récent accord sur les indications géographiques conclu entre la Chine et l'Union européenne a enthousiasmé Phil Hogan, nouveau commissaire au Commerce et ancien commissaire à l'Agriculture, récemment venu en Chine, qu'il estime très utile pour la négociation d'un accord d'investissement Chine-Union européenne d'ici la fin de l'année prochaine. Cela montre que l'avantage mutuel est un moteur important pour l'approfondissement de la coopération entre les deux parties. Le nouveau livre de l'ancien Premier ministre français Jean-François Raffarin, « Le grand paradoxe », souligne également que le fait de travailler avec la Chine fera de la Chine un levier pour l'avenir de l'Europe.
La plus grande mission des relations sino-européennes est de répondre aux changements du monde. Les relations sino-européennes sont entrées dans une nouvelle ère, avec des perspectives prometteuses, mais aussi des défis sans précédent.
L'auteur est Wang Yiwei, chercheur à l'Institut de développement national et de recherche stratégique de l'Université Renmin de Chine, et titulaire de la chaire « Jean Monnet » de l'Union européenne.