Dernière mise à jour à 08h32 le 27/04
Le déplacement attendu, mercredi, d'Emmanuel Macron dans le nord de la France, à Amiens, sa ville natale, où l'usine Whirlpool est menacée de fermeture, a été perturbé par une visite surprise de sa rivale dans la course à l'Elysée, Marine Le Pen, qui a rencontré des salariés sur le parking de l'entreprise, donnant lieu à un duel par images interposées entre les deux candidats à l'élection présidentielle du 7 mai.
La tension est montée d'un cran dans la campagne de l'entre-deux-tours. La candidate d'extrême droite s'est rendue mercredi à la mi-journée devant le site Whirlpool d'Amiens pendant que, à quelques kilomètres de là, Emmanuel Macron s'entretenait, comme prévu, avec des délégués syndicaux de cette entreprise.
Il y a trois mois, le groupe américain d'électroménager a annoncé qu'il allait délocaliser la production du site d'Amiens en Pologne en juin 2018 et fermer l'usine de sèche-linges qui emploie près de 290 personnes. Une soixantaine de salariés en grève manifestent depuis lundi. Tout un symbole dans cette région des Hauts-de-France déjà frappée par de nombreuses fermetures de sites industriels.
"Je suis là aux côtés de salariés, sur le parking, pas dans des restaurants amiénois", a lancé la candidate d'extrême droite, qui s'est défendue de "faire un coup médiatique". "Je suis ici à ma place, exactement là où je dois être, au milieu des salariés de Whirlpool qui résistent à cette mondialisation sauvage, à ce modèle économique honteux", a-t-elle insisté. Avant de railler: "Je ne suis pas en train de manger des petits fours avec quelques représentants qui en réalité ne représentent qu'eux-mêmes".
Marine Le Pen s'est faite photographier aux côtés de salariés, faisant des selfies pendant la petite demi-heure qu'a duré sa visite. Elle a promis que, si elle était élue, l'usine Whirlpool ne fermerait pas.
La direction de Whirlpool a très rapidement critiqué, dans une déclaration écrite, "l'instrumentalisation" d'un "dossier industriel".
Le candidat d'En Marche! a tenté de répliquer en annonçant qu'il rencontrerait des salariés de l'entreprise dans l'après-midi. "Madame Le Pen fait de l'utilisation politique, puisqu'elle va haranguer des militants politiques sur un parking", a-t-il dénoncé.
"Madame Le Pen est donc venue à Amiens parce que j'y venais. Bienvenue à elle. Mais Madame Le Pen n'a pas compris comment fonctionnait le pays et nous n'avons définitivement pas la même ambition, ni le même projet", a déclaré Emmanuel Macron. Avant d'ajouter: "Je veux que toutes et tous se rendent compte de ce qu'est le projet de Mme Le Pen. Il ne règle rien à la situation de Whirlpool, qui doit retrouver un repreneur".
Lors de son arrivée mouvementée sur le site, vers 15h20, coincé entre les salariés, les journalistes et son service d'ordre, le favori à l'élection présidentielle a été accueilli par des sifflets et aux cris, parfois, de "Marine Présidente". L'ancien ministre de l'Economie a été apostrophé par des salariés lui reprochant d'être le "candidat de la mondialisation". Des militants du Front national, le secrétaire départemental du parti notamment, étaient présents.
Malgré la confusion, Emmanuel Macron a finalement pu discuter un bon moment, sur le parking de l'usine, avec un groupe de salariés. Il a notamment réitéré son projet pour le site d'Amiens. "Je considère que Christophe Sirugue (l'actuel secrétaire d'État chargé de l'industrie, ndlr) a fait du bon travail jusqu'ici. Je ne promets pas monts et merveilles, je ne fais pas de promesses intenables", a assuré le candidat d'En Marche!. S'il est élu, il étudiera les offres de reprises et n'"homologuera aucun plan de sauvegarde de l'emploi qui ne serait pas à la hauteur", a-t-il ajouté.
"Je ne vais pas vous dire que je nationaliserai Whirlpool. Ça ne résoudrait pas votre problème", a dit Emmanuel Macron, s'efforçant de ne pas donner la même image que François Hollande qui, lors de sa campagne en 2012, était venu exprimer sa solidarité aux métallurgistes de Florange en Lorraine en laissant entendre que l'usine ne fermerait pas. Une image encore dans toutes les mémoires.
La journée de l'équipe du candidat En Marche! a été d'autant plus animée qu'elle a également dû déminer suite aux déclarations inopportunes de l'économiste Jacques Attali, soutien déclaré d'Emmanuel Macron, qui avait commenté sur la chaîne de télévision LCI à propos du conflit social sur le site Whirpool d'Amiens: "C'est une anecdote, non pas au sens péjoratif du mot... Ça s'inscrit dans un contexte plus large, c'est-à-dire le contexte de la mondialisation ou de la fermeture".
D'une façon générale, la campagne de l'entre-deux-tours n'a pas débuté sous les meilleurs auspices pour Emmanuel Macron. Depuis l'annonce des résultats du premier tour, dimanche, le jeune prétendant à l'Elysée, 39 ans, a notamment dû essuyer des critiques pour son attitude jugée "trop triomphaliste", s'attirant même une mise en garde du président Hollande.
Le fondateur d'En Marche! doit tenir mercredi soir un meeting à Arras, dans le nord de la France.