Dernière mise à jour à 08h47 le 29/06
Djibouti a célébré mardi le 40ème anniversaire de son indépendance que les autorités de ce pays de la Corne d'Afrique veulent en faire une immense fête nationale marquée par une série d'activités qui se poursuivront tout au long de l'année.
Après le lever du drapeau national qui s'est tenu lundi soir à minuit au stade Gouled, principal complexe sportif du pays, et où des milliers de Djiboutiens de tout bord ont chanté en communion l'hymne national en présence notamment du président de la République, Ismail Omar Guelleh, de l'ensemble des membres du gouvernement et des parlementaires, le traditionnel défilé militaire du 27 juin, retransmis en direct à la télévision, a marqué particulièrement tous les esprits cette année.
Dans l'exécution de la parade militaire effectuée par tous les corps armés de Djibouti ainsi que la gendarmerie et la police, il y a une nouveauté cette année : la présence des forces étrangères basées à Djibouti, à savoir les forces françaises stationnées à Djibouti (FFDJ), ainsi que les troupes américaines, japonaises, italiennes et chinoises qui ont toutes pris part au défilé militaire de ce 27 juin.
La traditionnelle parade militaire de la fête de l'indépendance intervient cette année dans un contexte très particulier marqué par un réel regain de tension entre Djibouti et l'Erythrée après que le Qatar ait retiré, il y a quelques jours, ses troupes d'interposition à la frontière entre ces deux pays qui se disputent depuis plusieurs années la souveraineté d'une zone terrestre appelée Doumeira.
"Quand une nation vit une situation qui peut déboucher en tout moment sur un conflit armé avec un autre pays, toutes les composantes de cette nation, les hommes, les femmes et les enfants, tous et sans exception, affichent ce même regard perdu en quête d'une assurance qui semble osciller dans le vide avant de se poser toujours et définitivement sur le courage et le dévouement de mêmes hommes : l'Armée", explique avec métaphore Farah Gabobe, à la fin du défilé à un groupe de jeunes également impressionnés par la qualité de cette parade militaire.
Pour ce sous-officier de l'armée de terre à la retraite, les forces armées djiboutiennes ont montré aujourd'hui avec la manière qu'elles avaient encore des épaules larges et surtout sûres pour porter à elles seules tout l'espoir du pays en temps de guerre et protéger la nation.
En écoutant de plus près les débats souvent passionnants et parfois philosophiques qui animent les "mabrazes" de la capitale djiboutienne (lieu où se retrouvent chaque après-midi les hommes pour de séances de khat, une plante euphorisante que l'on mâche à longueur des heures), l'autre instant de cette journée qui a scellé définitivement d'un sceau indélébile cette aura populaire et sans précédant des Djiboutiens pour leurs hommes en uniforme a été le dépôt d'un gerbe de fleurs au monument des martyres par le chef de l'Etat djiboutien.
Pour Awaleh Atteyeh, peintre-graphiste, le doute n'était plus permis. Aujourd'hui, ni la traditionnelle parade militaire ni aucune de ses autres activités annexes de ces festivités de l'indépendance n'est la même.
Les dernières évolutions de la situation à la frontière entre son pays et l'Erythrée auraient tout changé dans les cœurs et la conscience de ses concitoyens, donnant à chaque activité une autre dimension toute particulière.
"Combien de fois ai-je vu le Président de la République déposer de gerbe de fleurs au monument des Martyrs. Mais il n'y a pas de mots pour exprimer ce que j'ai ressenti aujourd'hui. Ce fut un moment chargé de symboles et d'émotions intenses. J'avais l'impression de réaliser pour la première fois que des hommes et des femmes ont donné de leur vie pour ce pays, et que d'autres, sous le même uniforme, sont prêts, nuit et jour, pour le même sacrifice. Je veux dire juste un grand merci à tous ces héros que ni moi ni le pays tout entier ne saura jamais leur remercier autant", lâche-t-il sans faire bouger ses lèvres sèches noircies par le tabac, lui dont le frère aîné est tombé sur le champ d'honneur pour défendre ce pays lors de la guerre éclaire de trois jours qui a opposé Djibouti et l'Erythrée en 2008 pour ce même différend.
Alors, entre deux tasses de café, quand ont évoque librement le poids de cette nouvelle donne avec le poète djiboutien d'expression somali, Farah Libah, la réponse ne parvient à se cacher derrière aucun vers. Au contraire, elle vient s'afficher en prose, toute nue : "Qui a dit que seule la poésie permet de survivre ? Mais diable, les hommes en uniforme entretiennent la rythmique de cette vie, ils sont cette force et cette assurance salutaires qui donnent à ce monde, toute la magie de sa poésie céleste...".