Dernière mise à jour à 10h37 le 22/04
Les onze prétendants à l'Elysée ont tenté, tant bien que mal, jeudi soir, de défendre leur programme lors de l'ultime émission télévisée avant le premier tour de l'élection présidentielle qui doit se tenir dimanche. Un grand oral, destiné à convaincre les indécis, perturbé par l'attentat à Paris qui a coûté la vie à un policier.
L'incertitude a longtemps plané sur l'organisation du dernier round télévisé de la campagne présidentielle, plusieurs candidats refusant de débattre à trois jours d'un premier tour de scrutin imprévisible. C'est finalement le format d'un grand oral qui a été retenu pour l'émission politique "15 minutes pour convaincre" diffusée jeudi soir sur France 2.
Mais, au moment où les onze prétendants à la charge suprême de la République s'adonnaient à cet exercice, un policier a été tué, deux autres ainsi qu'une passante blessés, lors d'une attaque sur les Champs Elysées revendiquée par l'organisation Etat islamique. Une nouvelle que les candidats ont apprise dans une certaine confusion, certains la commentant au fil de l'émission, tous rendant hommage aux victimes lors de la conclusion de leur intervention.
Chacun d'entre eux disposait d'un quart d'heure pour répondre aux questions des journalistes et développer un aspect de leur programme. Premier candidat à avoir été interviewé, le chef de file de la gauche radicale Jean-Luc Mélenchon, en forte progression dans les sondages ces dernières semaines, s'est employé à rassurer. "Je ne suis pas un homme de pagaille", a-t-il insisté.
Le candidat de La France insoumise a assuré que son projet de VIe République ne rendrait pas le pays ingouvernable et a défendu la mise en place d'un "référendum révocatoire". "Deux Etats américains et des Etats latino-américains font ça, ça s' appelle la démocratie, il ne faut pas avoir peur du peuple", a-t-il plaidé.
Concernant sa politique fiscale qui inquiète, il a rétorqué: "On va taxer à 90 % au-delà de 400.000 euros de revenu par an (...), ça concerne très peu de monde". En matière de politique internationale, il a défendu "une France indépendante qui soit tournée vers la paix". Quant à sa position vis-à-vis de Berlin, il a précisé que "les Allemands ne sont ni nos ennemis, ni nos maîtres, ce sont nos partenaires". Avant de conclure: "Je m'apprête à gouverner le pays."
Marine Le Pen s'est elle aussi exprimée avant la fusillade sur les Champs-Elysées mais a consacré une bonne partie de son intervention à muscler encore son discours sur la lutte contre l'insécurité et le terrorisme islamiste. Trois jours après l'arrestation, à Marseille, de deux terroristes présumés, suspectés de préparer un attentat pendant la présidentielle, la candidate d'extrême droite a réaffirmé que si elle avait été au pouvoir les attentats de 2015 et 2016 n'auraient pas eu lieu.
"Il faut maîtriser les frontières nationales, créer 15 000 postes de gendarmes et de policiers, des postes de douaniers. Il faut s' attaquer au communautarisme, expulser les fichés S. Il y a 17 000 fichés S, dont 10 000 en lien avec le fondamentalisme islamique", a-t-elle affirmé. Avant d'asséner.
"Tous les étrangers condamnés pour des délits ou des crimes doivent rentrer chez eux. Je veux la suppression du droit du sol. La nationalité française s' hérite ou se mérite".
Le leader d'En Marche! Emmanuel Macron a été le premier candidat à s'exprimer, de sa propre initiative, sur la fusillade des Champs Elysées à un moment où le caractère terroriste de l'attaque n'était pas encore avéré. "La première mission d'un président, c'est de protéger", a-t-il déclaré dans son introduction. Une formule qu'il a répétée avec insistance lors de sa conclusion en fin d'émission.
Lors de son interview, l' ancien banquier de 39 ans, s'est présenté comme "un guerrier, un battant". "J' entends bien me battre jusqu' à la dernière seconde", a clamé le favori des sondages.
L'ancien ministre de l'économie a une nouvelle fois justifié sa volonté de réserver l'impôt de solidarité sur la fortune au patrimoine immobilier, une mesure qui ne fait pas l'unanimité.
Il a par ailleurs mis l'accent sur l'éducation, évoquant la possible diminution du nombre d'élèves par classes dans les Réseaux d'éducation prioritaire "dès la rentrée prochaine".
Le candidat de la droite François Fillon s'est quant à lui posé en président protecteur capable de défendre les Français contre le "terrorisme islamique". Il a une nouvelle fois soutenu sa ligne diplomatique de rapprochement avec Moscou et appelé à "une coalition mondiale pour éradiquer" les groupes djihadistes, en acceptant de "s'allier" notamment "avec les Russes et les Iraniens".
L'ancien premier ministre du président Sarkozy a par ailleurs plaidé en faveur du retrait de la nationalité aux Français partis faire le djihad, de l'interdiction des "mouvements qui se réclament du salafisme et des Frères musulmans" et pour l' arrestation préventive d' une partie des fichés S.
Le candidat socialiste, Benoît Hamon, relégué dans les sondages à la cinquième place, s'est montré offensif, attaquant ses adversaires à gauche comme à droite. Il a déploré que pendant la campagne se soient succédé "des monologues". "Nous aurions pu avoir un débat démocratique. Nous sommes à une époque où le spectacle a tellement pris le dessus sur la démocratie qu' on a des candidats qui veulent choisir leurs journalistes, choisir les questions que l'on pose, se soustraire au débat démocratique", a-t-il tempêté, raillant François Fillon.
L'ancien ministre de l'éducation du président Hollande a opté pour une posture très pro-européenne. "Je n' ai pas envie qu' on joue l' Europe à la roulette russe. Le projet européen est directement menacé", a prévenu le candidat socialiste, en soulignant sa différence avec Jean-Luc Mélenchon, et en défendant la création d'une assemblée parlementaire de la zone euro.
Selon les chiffres de Médiamétrie communiqués vendredi, quelque 4,66 millions de téléspectateurs (21,1% de part d'audience) ont regardé jeudi soir sur France 2 cette émission politique.