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« Bienvenue » à Onitsha, la ville la plus polluée du monde...

le Quotidien du Peuple en ligne | 15.02.2017 08h47

Quand on approche du marché d'Okpoko en traversant un smog épais sur la selle d'un « okada » (moto taxi), la réaction naturelle est de couvrir son nez pour se protéger contre la tempête de poussière -mais cet effort est dérisoire. Quand un camion fonce en avant, soulevant encore un autre nuage rouge de saleté, un commerçant tourne la tête d'un enfant en train de dormir loin de la route, dans un acte protecteur aussi poignant qu'inutile. Ce tableau apocalyptique est une journée typique de la ville portuaire d'Onitsha, dans le Sud du Nigeria, qui a acquis l'année dernière une notoriété dont elle se serait volontiers passée quand elle a été classée la pire ville au monde pour ses niveaux effrayants de matières particulaires PM10 contenus dans son air.

La concentration annuelle moyenne à Onitsha a en effet été enregistrée à 594 microgrammes par mètre cube par l'Organisation mondiale de la santé, dépassant massivement la limite annuelle de 20 μg / m3 pour les PM10. Le terme PM10 se rapporte à des particules grossières de poussière entre 10 et 2.5 micromètres de diamètre, tandis que PM2,5 sont encore plus fines et plus dangereuses quand elles sont inhalées, s'installant profondément dans les poumons d'une personne. Parmi les sources de ces deux polluants figurent les tempêtes de poussière, les gaz émis par les véhicules, tous les types de combustion et les activités industrielles comme la fabrication du ciment, la construction, les mines et la fonderie. Onitsha obtient des bonnes élevées sur tous ces points -tout comme d'autres villes nigérianes à croissance rapide telles Kaduna, Aba et Umuahia, qui figurent également parmi les 20 villes les plus polluantes aux PM10 de l'OMS.

Sur le marché très fréquenté d'Okpoko d'Onitsha, le moniteur de la qualité de l'air enregistre 140 pour les PM10 et 70 pour PM2,5 -des chiffres tous au-dessus des niveaux sains recommandés, mais qui ne sont encore rien comparés aux chiffres atteints dans d'autres parties de ce pôle industriel et commercial densément peuplé. Les environs du marché sont aussi perpétuellement poussiéreux, car les vendeurs de bois scient du bois de charpente de différentes formes et tailles. La qualité de l'air est encore aggravé par toutes les particules de sable fin qui volent au dos des camions qui passent dans l'une des nombreuses entreprises de dragage sur la rive du Niger, juste derrière le marché du bois. Une gardien de la circulation a travaillé au même endroit pendant deux jours. Comment fait-elle face à la poussière ? « Je fais juste mon travail », répond-elle à contrecœur. « La poussière ne tue pas les gens ». Mais elle se trompe. Selon le Programme des Nations Unies pour l'environnement (Unesco), environ 600 000 décès chaque année en Afrique sont associés à la pollution atmosphérique, tandis qu'un rapport d'octobre 2016 de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) suggère que l'air pollué pourrait tuer 712 000 personnes prématurément chaque année à travers le continent.

Cette attitude est assez répandue, car les gens ne réalisent pas le danger qu'ils courent au quotidien, et qu'ils ne sont tout simplement pas informés de ce qui se passe réellement pour leur santé. « Onitsha est assez sale », lance un homme d'affaires habitant le quartier de Nwangene, « mais le gouvernement ne fait rien pour s'en occuper. Nous faisons des nettoyages mensuels, mais la ville redevient sale. C'est la responsabilité du gouvernement de garder la ville propre, pas le travail des habitants -les gens dans cette ville sont trop occupés à lutter pour avoir un salaire ».

De son côté, le docteur Nelson Aluya explique que personne ne prend «la pollution de l'air au sérieux au Nigeria », pas même le gouvernement qui ne la contrôle pas, et cela ne fait qu'empirer avec une population qui augmente -le Nigeria est le pays le plus peuplé d'Afrique avec 174 millions d'habitants- et une industrialisation en plein boom. Manifestement en plein désarroi, le médecin a alors ajouté, à propos des services de santé : « Les soins ne sont pas standardisés pour surveiller les personnes souffrant de maladies pulmonaires obstructives dues à une exposition à l'air pollué, et il n'y a pas de procédures standards dans les hôpitaux pour vérifier les niveaux d'oxygène », concluant, fataliste « Donc vous voyez, nous sommes plongés dans de graves ennuis. Si nous ne reconnaissons pas le fait qu'il y a un problème, alors comment le résoudre ? Malheureusement, les gens vont continuer à mourir alors que les parties prenantes demeurent indifférentes ».

(Rédacteurs :Guangqi CUI, Wei SHAN)
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