Dernière mise à jour à 09h48 le 27/01
Les deux finalistes de la primaire de la gauche à la présidentielle 2017 en France, Benoît Hamon et Manuel Valls, ont assumé leurs différences, mercredi soir lors du débat télévisé du second tour, à la fois sur le travail, le revenu universel, la laïcité ou encore la lutte contre le terrorisme.
L'ancien ministre de l'Education Benoît Hamon a insisté sur la nécessité d'anticiper les conséquences de la révolution numérique sur l'emploi. En effet, selon un rapport de l'OCDE, près de 10% des emplois seraient menacés en France d'ici 2025 en raison de l'impact de la révolution numérique, a-t-il indiqué. Et pour faire face à cette raréfaction de l'emploi, M. Hamon propose un revenu universel d'existence en deux étapes. Une première étape qui concernera les 18-25 ans (600 euros), avant d'envisager sa généralisation à 750 euros pour tous les Français.
Le financement du revenu universel se fera par un transfert de richesses, c'est-à-dire grâce aux recettes de nouveaux prélèvements, comme par exemple la taxe sur les robots, une nouvelle fiscalité sur le patrimoine, une meilleure lutte contre l'évasion fiscale ou encore la fiscalisation des activités des géants du numérique qui ne paient pas d'impôts, a expliqué M. Hamon. L'ancien ministre de l'Education propose également d'encourager la réduction du temps de travail à 32h avec en contre partie une baisse des cotisations sociales patronales.
Une vision que Manuel Valls ne partage pas, en effet, selon l'ancien Premier ministre, bien que nos sociétés changent à cause du numérique le travail ne disparaitra pas. Celui-ci propose d'accompagner cette numérisation par une sécurité sociale professionnelle, une formation tout au long de la vie à travers le compte personnel d'activité. "Je ne veux pas d'une vision qui consiste à dire que le travail disparait donc on distribue un revenu à chacun. Il vaut mieux se qualifier par la formation pour affronter le déficit de l'emploi", a-t-il indiqué. A la place d'un revenu universel, il se dit plutôt favorable à un "revenu décent", en fusionnant les minima sociaux actuels. Contrairement à Benoît Hamon, M. Valls défend l'idée de travailler plus pour gagner plus, et veut à cet effet défiscaliser les heures supplémentaires.
Les deux finalistes s'opposent également sur des questions de société comme par exemple la laïcité, notamment le port ou non du voile qui continue de faire débat en France. La laïcité c'est la liberté de croire ou de ne pas croire, la neutralité des fonctionnaires, mais c'est aussi le respect des lois qui ont été votées comme l'interdiction du voile, a rappelé M. Valls. "Il ne devrait pas y avoir le moindre accommodement sur la laïcité, car nous devons protéger nos compatriotes de culture musulmane qui sont aujourd'hui sous la pression de l'islam politique, de ceux qui veulent imposer les règles qui ne sont pas celles de la République", a dit l'ancien Premier ministre tout en indiquant qu'il faut répondre à ces questions par l'application de la loi.
Pour Benoît Hamon, la loi de 1905 répond déjà très clairement à toutes ces questions qui sont aujourd'hui posées. Selon lui, cette loi permet de croire et de ne pas croire et son article 31 dit qu'on ne peut empêcher quelqu'un d'exercer un culte ou l'obliger à exercer ce culte. "Là où le voile est imposé à une femme, nous devons tous nous mobiliser pour qu'elle n'ait pas à se soustraire au regard des hommes en raison de l'imposition d'un dogme. Mais là où une femme décide librement de porter le foulard, et il en existe, au nom de la loi de 1905 elle est libre de le faire, et il faut lui assurer cette liberté. Nos compatriotes musulmans ont le droit d'exprimer leurs convictions", a défendu M. Hamon
Autre sujet de divergence, la lutte contre le terrorisme, plus précisément sur la prolongation ou non de l'état d'urgence. Manuel Valls promet de prolonger l'état d'urgence autant que nécessaire s'il est élu, pour garantir la sécurité des Français, et de donner davantage de moyens aux forces de l'ordre et à la justice. M. Valls a rappelé que Benoît Hamon n'avait pas voté les projets de loi prorogeant l'état d'urgence ainsi que la loi sur le renseignement.
L'état d'urgence ne peut être un état permanent car il n'a été efficace que le mois qui a suivi sa première mise en oeuvre, les assignations à résidence étant aujourd'hui beaucoup moins utiles, a répliqué M. Hamon. Selon le député et ancien ministre de l'Education, la prolongation de l'état d'urgence ne se justifie pas en raison des moyens qui ont été donnés aux forces de police et à la justice. "On peut lutter efficacement contre le terrorisme et appliquer l'état de droit, comme le demande le Conseil constitutionnel et le Conseil d'Etat", a-t-il insisté.
Selon un sondage Elabe, Benoît Hamon est jugé candidat le plus convaincant à l'issue de ce débat à 60%, contre 37% pour Manuel Valls. Il est également en tête chez les sympathisants de gauche qui le jugent plus convaincant, avec 61% contre 36% pour l'ancien Premier ministre.